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30 ans de Cardiologie

Publié le 07 déc 2020Lecture 5 min

Avantages des troponines hypersensibles sur les Tn conventionnelles

G. LAMBERT, Paris

Les troponines hypersensibles (Tn hs) permettent de mettre en évidence des variations dans les valeurs basses, qui permettent quant à elles un diagnostic plus précoce des infarctus du myocarde.

Déjà avant les années 1960, la définition de l’infarctus du myocarde (IdM) par l’OMS était associée à des marqueurs biologiques de nécrose myocardique. Les immunodosages de la troponine ont commencé dans les années 1990 et aujourd’hui la quatrième définition universelle de l’IdM(1) se réfère à des troponines hypersensibles introduites depuis 2015. Cette dernière définition introduit deux notions importantes : celle de dommage cardiaque (cardiac injury) et celle d’IdM aigu ou chronique. Le dommage cardiaque est défini pour une valeur de la Tn hs > 99e percentile d’une population normale et il est aigu lorsqu’il existe une variation du taux de ce marqueur. Ce dernier critère d’ordre cinétique suppose donc que deux dosages ont été réalisés pour objectiver la variation. L’IdM de type 1 répond à ces deux critères associés à certains ou l’ensemble des signes cliniques suivants : une ischémie récente, une modification ischémique à l’ECG, une onde Q pathologique, des arguments à l’imagerie et la mise en évidence d’une thrombose coronaire. Il s’agit donc d’un diagnostic clinico-biologique. Deux types principaux d’IdM sont retenus dans cette définition : l’IdM de type 1 consécutif à une rupture de plaque avec thrombus occlusif ou non ; l’IdM de type 2 lié à un déficit en oxygène en rapport avec une athérosclérose, un vasospasme, une dissection coronaire et toute cause de déséquilibre dans la demande ou la fourniture d’O2 (hypotension artérielle, choc, insuffisance rénale, tachyarythmies, etc.). L’ensemble de ces mécanismes entraîne une mort de la cellule myocardique dont la signature est l’augmentation de la troponine. L’augmentation de sensibilité des troponines a permis de mettre en évidence les variations de Tn hs dans de nombreuses pathologies qui, en plus des ischémies myocardiques de type 2, incluent également les atteintes myocardiques non ischémiques (contusion cardiaque, myocardite, etc.) et les atteintes myocardiques multifactorielles indéterminées (Tako-Tsubo, sepsis, embolie pulmonaire sévère, etc.). Des variations quantitatives et qualitatives Les variations de troponine surviennent à la fois de façon quantitative et qualitative, de sorte qu’il est difficile de savoir quelle forme moléculaire doit être dosée et à quel moment. Les troponines sont des composants des myofibrilles présentes dans le cytoplasme cellulaire (TnT) mais aussi sous forme de macro-complexes. En cas de nécroses, différentes formes moléculaires passent dans le sang et sont reconnues par les dosages. Il existe alors une variation quantitative et une variation qualitative(2), ce qui complique la standardisation des dosages au laboratoire. Six mécanismes différents expliquent l’augmentation de la troponine sérique(3) : la nécrose myocytaire ; l’apoptose ; le renouvellement physiologique des myocytes ; la libération cellulaire de produits de dégradation issus de la protéolyse ; l’augmentation de la perméabilité de la membrane cellulaire ; enfin, la formation et la libération de vésicules membranaires. Si la TnT est un antigène constant en post-infarctus, la TnI est présente sous différentes formes avec différents délais d’élévation après un IdM(4). Un constat confirmé par un article plus récent(5) montrant l’homogénéité de la TnT alors que la TnI forme des complexes avec les TnT et les TnC. Variations dans les valeurs basses de Tn hs Les troponines hypersensibles sont définies par un coefficient de variation < 10 % à la valeur du 99e percentile, et la possibilité de fournir une valeur quantifiable chez au moins 50 % d’une population saine. In fine l’objectif est d’améliorer la sensibilité diagnostique et pronostique. Le développement des troponines s’est fait par augmentation de la taille d’échantillon, la réduction des interférences avec le recours aux anticorps, la modification des microparticules, l’optimisation des temps d’analyse, l’optimisation des Ac et des Ag de détection et l’augmentation du nombre d’Ac de capture. Les premières générations de ces TnT hs étaient positives chez moins de 50 % des sujets sains, un chiffre qui est passé à plus 95 % pour les troisièmes générations. Les dosages actuels détectent donc des variations pour des valeurs basses, des performances qui s’amélioreront encore à l’avenir. Pour donner un ordre de grandeur, chez un patient sain présentant une TnT hs à 13 ng/l, le BNP est 40 fois plus élevé, la bilirubine T 230 x 106 fois et la glycémie 14 x 109, ce qui témoigne de la finesse des technologies mises en œuvre pour mettre en évidence ces variations sur des taux bas de TnT hs. Il apparaît que pour la plupart des Tn, les taux sont plus élevés chez l’homme que chez la femme(6), un constat probablement en rapport avec une différence de masse cardiaque. Ce problème ne semble pas exister pour les TnT qui, en revanche, augmentent avec l’âge(7), une réalité qui peut poser des problèmes diagnostiques aux urgences chez un patient âgé. Les troponines hypersensibles permettent donc de voir des variations chez le sujet sain, d’identifier des débuts d’IdM ou des micro-IdM, l’amplitude de l’augmentation des taux étant corrélée à la taille de la nécrose myocardique. La mesure des taux de TnT hs chez les sujets sains peut varier d’environ 45 % dans un délai d’une heure(8), ce qui signifie que deux dosages successifs chez un sujets sain aux urgences peuvent diverger de 50 % sans signer une souffrance myocardique. Au laboratoire, la qualité du dosage des Tn hs pour les valeurs basses est donc un enjeu important qui a fait l’objet de recommandations par l’International Federation of Clinical Chemistry an laboratory Medecine (IFCC). Pour des valeurs < 10 ng/l, la marge d’erreur doit être < 10 %, avec une erreur tolérable totale d’environ 30 %. Une équipe italienne(9) a mené une étude afin de vérifier si ces recommandations étaient respectées. Il apparaît que de tels contrôles permettent d’alerter en cas de variations trop importantes et d’améliorer la qualité analytique par des vérifications répétées. Cette qualité a des implications cliniques, en particulier pour les algorithmes décisionnels préconisés par certaines équipes sur deux dosages à une heure d’intervalle. Si la première valeur est < 12 ng/l ou la variation entre H0 et H1 < 3 ng/l, alors le diagnostic d’IdM peut être exclu, ce qui nécessite une grande qualité analytique des dosages. Pour les TnT hs, les variations pour les valeurs basses entre deux analyseurs d’un même laboratoire n’est jamais > 1 ng/l, avec une imprécision de l’ordre de 1 %(10). Dans ces conditions, la différence entre deux dosages réalisés à une heure d’intervalle est fiable. À l’avenir, la possibilité d’observer des variations dans les valeurs basses de Tn pourrait en faire un marqueur de risque cardiovasculaire, à condition toutefois que la qualité analytique des dosages soit respectée. Les significations cliniques de ces faibles variations restent cependant à préciser. D'après la communication de Guillaume LEFÈVRE (Paris) dans le cadre de la journée "30 ans d'innovation en cardiologie", organisée par Roche Diagnostics France << RETOUR  

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