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Congrès

Publié le 31 mar 2012Lecture 6 min

DT2 et insulinothérapie – Mise au point et perspectives

M. DEKER


Cœur et diabète
Si l’hyperglycémie est directement impliquée dans la genèse des complications vasculaires du diabète, le déficit insulinique, phénomène précoce dans le diabète, joue un rôle central.
À côté de ses effets bénéfiques sur la glycémie, l’insuline exerce des effets vasculaires indépendants du contrôle glycémique : anti-inflammatoire, antioxydant, antiathérogène et vasodilatateur. Un apport exogène précoce d’insuline pourrait permettre de modifier le risque cardiovasculaire.

L’insuline, des effets vasculaires pléiotropes L’hyperglycémie est responsable d’un stress oxydatif et de processus inflammatoires, les pics d’hyperglycémie postprandiale étant particulièrement délétères. Le stress oxydatif induit par l’hyperglycémie joue sans doute un rôle majeur dans la survenue des complications du diabète, en activant plusieurs voies métaboliques : la voie des polyols, la production des produits de glycation avancée (AGE), l’activation de la protéine kinase C (PKC) consécutive au blocage de la NADPH. Le processus pro-inflammatoire induit par l’hyperglycémie persiste à long terme ; a contrario, le contrôle glycémique précoce se traduit à long terme par un bénéfice cardiovasculaire, tel qu’illustré par le suivi prolongé des patients ayant bénéficié d’un contrôle glycémique intensif dans l’étude UKPDS et décrit sous le nom de « mémoire glycémique ». L’insuline exerce sur l’endothélium un effet vasodilatateur ; ce dernier est aboli en présence d’un excès d’acides gras libres qui vont sélectivement inhiber la voie de signalisation conduisant à la vasodilatation au profit de la voie vasoconstrictrice, d’où une augmentation du tonus vasculaire périphérique. L’insuline est un agent antilipolytique très puissant, qui s’oppose à l’action lipolytique des catécholamines. L’insuline possède un effet anti-inflammatoire qui pourrait être relayé par les toll-like receptors (TLR) présents sur de nombreuses cellules, notamment du système immunitaire. Ces récepteurs sont activés par de nombreux agents infectieux et certains acides gras, impliqués dans l’athérosclérose et l’insulinorésistance. Leur expression est diminuée en présence d’insuline. Depuis les années 2000, des études in vitro suggéraient que l’insuline glargine aurait une plus grande affinité de liaison pour le récepteur de l’IGF-1 et des effets mitogènes plus importants que les insulines humaines. Il faut néanmoins préciser que ces effets mitogènes ont été observés in vitro à des concentrations suprathérapeutiques et sur des lignées cancéreuses qui surexpriment le récepteur IGF-1 et non celui de l’insuline. La glargine est une prodrogue qui est rapidement métabolisée dans l’organisme, d’abord en un métabolite intermédiaire, puis en deux métabolites, M1 et M2, qui possèdent une affinité équivalente à celle de l’insuline humaine pour les récepteurs de l’insuline et une affinité très inférieure pour le récepteur de l’IGF-1. In vivo, une étude a établi l’évolution temporelle de la transformation de l’insuline glargine en métabolites M1 et M2 chez des DT1. Un effet dose-dépendant est observé sur l’utilisation du glucose. Après une injection d’insuline glargine, celle-ci comme son métabolite M1 sont quasiment indétectables, seul M2 est retrouvé au niveau plasmatique. En l’absence de glargine et de son premier métabolite, dont les effets mitogènes sont similaires à ceux de l’insuline humaine, il est difficile d’imaginer que la glargine puisse reconnaître, occuper et activer le récepteur IGF-1 de manière efficace et donc improbable qu’elle soit responsable d’un sur-risque carcinogène.   Prévention des complications cardiovasculaires chez le diabétique Les maladies cardiovasculaires et plus particulièrement la maladie coronaire représentent la première cause de décès chez les diabétiques. Parmi les patients hospitalisés pour un événement cardiaque, les deux tiers ont un diabète ou une dysglycémie. La relation entre l’équilibre glycémique évalué par l’HbA1c et le risque d’événements cardiovasculaires est quantitative, continue et linéaire. Le risque de complications cardiovasculaires est fortement corrélé aux valeurs de la glycémie à jeun, y compris chez les sujets non diabétiques, et augmente régulièrement dès une valeur seuil de 0,9 g/l. L’augmentation du risque précède le diagnostic du diabète dans la plupart des études. Les sujets dysglycémiques ont un déficit insulinique précoce et une insulinorésistance, ce qui suggère qu’il serait bénéfique de suppléer précocement à ce déficit. C’est dans ce contexte que se positionne l’étude ORIGIN, qui évalue l’effet d’un traitement par l’insuline glargine dans la prévention du risque cardiovasculaire, comparativement à une prise en charge usuelle, en essayant de répondre à deux questions : • chez les sujets à haut risque cardiovasculaire ayant un diabète récent ou une dysglycémie (hyperglycémie à jeun ou intolérance au glucose), l’insuline exogène visant à ramener la glycémie à jeun (GAJ) à 0,95 g/l au moyen de la glargine va-t-elle davantage diminuer le risque d’événements cardiovasculaires que les approches thérapeutiques standard ? • chez les sujets dysglycémiques, l’insulinothérapie va-t-elle retarder le risque de développement d’un diabète ? ORIGIN est un essai randomisé en plan factoriel 2 x 2, insuline glargine versus contrôle glycémique habituel et oméga-3 versus placebo, avec un suivi de 6 ans. La cible est une GAJ < 5,3 mmol/l, avec une titration hebdomadaire de l’insuline ; chez les patients déjà traités par antidiabétique oral (ADO), l’insuline est rajoutée. Dans le groupe de traitement standard, les patients non diabétiques sont réévalués tous les ans ; ils sont pris en charge soit par un traitement hygiénodiététique soit par ADO en mono- ou bithérapie, et jusqu’à 3 ADO en essayant de retarder la mise sous insuline (autre que la glargine). Sont inclus des sujets des deux sexes, âgés de plus de 50 ans, ayant soit une dysglycémie (GAJ ≥ 1,10 g/l ou HG à 2 h ≥ 7,8 (140) soit un diabète de type 2 traité à dose stable depuis ≥ 10 semaines, et un risque cardiovasculaire élevé (antécédents IDM, AVC, revascularisation, angor documenté ; ou microalbuminurie, protéinurie, HVG, sténose rénale 50 %, index pression systolique < 0,9). Deux critères de jugement primaires composites sont évalués : mortalité CV, IDM et AVC non fatals ; mortalité CV, IDM et AVC non fatals, revascularisation, hospitalisation pour insuffisance cardiaque. S’y ajoutent des critères secondaires : événements microvasculaires (néphropathie ou rétinopathie) ; développement d’un DT2 chez les sujets initialement dysglycémiques ; mortalité toute cause ; ainsi que d’autres critères : cancers, angor, amputation, hospitalisation de cause CV, autres hospitalisations ; fonction cognitive, fonction érectile ; fractures et taille (densité osseuse) ; hypoglycémie ; rapport poids/taille, poids ; lipides. L’essai ORIGIN est conduit dans 40 pays et a déjà inclus plus de 12 500 patients. Ce sont des patients en majorité de sexe masculin (âge moyen 63,7 ans ± 7,84), ayant pour les deux tiers une maladie cardiovasculaire avérée et traités comme tels ; 20 % ne sont pas des diabétiques connus (dysglycémiques ou diabète récent) ; l’ancienneté du diabète est de 5,41 ±  6 ans ; l’HbA1c de 6,49 ± 0,97 % ; un tiers recevaient de la metformine et un tiers un insulinosécrétagogue. Comparativement aux autres études d’intervention, l’étude ORIGIN s’intéresse donc à des patients ayant une dysglycémie ou un diabète de diagnostic plus récent, ayant une prévalence de complications cardiovasculaires plus élevée. Les objectifs de contrôle glycémique sont plus stricts et le traitement est plus intensif partant d’une valeur d’HbA1c nettement plus basse (6,5 % en moyenne, comparativement à 7,5-9,4 % dans les études ACCORD, VADT et ADVANCE). Les résultats seront présentés à l’ADA. Insuline glargine et risque de cancer : qu’en est-il ? Il est notoire que les patients diabétiques présentent une augmentation de plusieurs formes de cancers. Une revue méthodique des études de la glargine ayant rapporté le risque de tous types de cancers, à l’exception des cancers cutanés, sous traitement a été conduite (9 études observationnelles, 30 essais randomisés et 1 étude cas-témoins). Ces données ont été réunies dans le cadre d’une métaanalyse, qui inclut 464 585 patients, soit 1 059 478 personnes-années. Le risque relatif de tous types de cancers est de 0,88 (0,79-0,97). Il est de 1,12 (0,92-1,37) pour le cancer du sein, 1,22 (0,99-1,50) pour le cancer de prostate et 0,73 (0,59-0,91) pour le cancer colorectal. Symposium réalisé avec le soutien de Sanofi Diabète avec la participation de B. Fève (Paris), P.-G. Steg (Paris) et P. Boyle (Lyon). Cœur & Diabète, 11 février 2012, Paris.

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