publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Nutrition

Publié le 14 fév 2013Lecture 15 min

Les édulcorants intenses : présumés innocents ou coupables ?

L. MONNIER(a), J.-L. SCHLIENGER(b), C. COLETTE(a) a. Institut Universitaire de Recherche Clinique, Montpellier ; b. Strasbourg.

Depuis leur découverte il y a plus de 100 ans(1), les édulcorants intenses sont un sujet de débat, la question fondamentale étant : sont-ils ou non dangereux pour la santé des individus ? Les édulcorants, qu’ils soient naturels ou non, ont pour dénominateur commun de reproduire le goût du sucre(2), qui occupe une place majeure dans la palette des saveurs et arômes(3). Considérés comme des additifs alimentaires, ils sont en général mentionnés sur les emballages par le sigle E9 suivi de deux chiffres supplémentaires en fonction de leur nature chimique.  

La saga chaotique des édulcorants intenses débute en 1871 par une découverte fortuite(1). Au cours d’une manipulation de laboratoire, Remsen, un chimiste de l’université John Hopkins à New York, découvrit que la substance qu’il testait avait un goût sucré. Il venait de découvrir la saccharine, le premier édulcorant intense. La suite de l’histoire se poursuit par le développement de nouveaux édulcorants dont la vocation est de reproduire le goût sucré tout en réduisant l’apport énergétique et les montées glycémiques postprandiales. C’est pour cette raison que les édulcorants sont largement préconisés par le corps médical comme substituts des sucres dans le traitement de l’obésité et des états diabétiques(4). Les résultats furent au rendez-vous en ce qui concerne la réduction des excursions glycémiques postprandiales chez les diabétiques. Le succès se fait toujours attendre dans le traitement de l’obésité(4). En effet, à ce jour, aucune étude n’a jamais démontré que les édulcorants utilisés isolément ou ajoutés à des produits alimentaires allégés soient capables de prévenir ou de traiter les surcharges pondérales. À cette déception est venue s’ajouter la frayeur engendrée par l’addition de produits artificiels dans les aliments naturels. Ces peurs s’inscrivent dans le contexte des nouvelles néophobies dominées par la peur de l’« industriel » quel qu’il soit et par l’application du sacrosaint principe de précaution.  Elles pourraient être assez rapidement conjurées si certains scientifiques ou « pseudo-scientifiques » ne continuaient pas à les entretenir pour des raisons diverses. La préservation de la santé des individus est leur credo avoué, les convictions idéologiques basées sur des rumeurs ou des preuves scientifiques douteuses ne sont jamais très loin et les préoccupations mercantiles et inavouées ne peuvent être écartées. Les lignes qui suivent sont destinées à éclairer le débat sur les édulcorants intenses entre présomption d’innocuité et accusation de dangerosité.    Les édulcorants intenses : qui sont-ils ? Plusieurs types de substances ont été proposées : la saccharine, les cyclamates, l’aspartame, le néotame, l’acésulfame de potassium, le sucralose et le rébaudioside A ou Stevia. Comme nous l’avons indiqué plus haut, une toute petite quantité de ces substances suffit pour obtenir un goût sucré et l’apport calorique est pratiquement nul lorsqu’elles sont ajoutées aux aliments auxquels elles sont censées apporter la saveur sucrée. Les caractéristiques des principaux édulcorants intenses avec leur dose journalière maximale admissible (DJA, mg/kg) sont données sur le tableau 1.    La saccharine et les cyclamates Ils ont une structure cyclique qui laisse planer sur eux un risque cancérogène. Actuellement la saccharine est uniquement réservée à l’usage pharmaceutique sous les noms de Sucredulcor®, Sun-Suc®. En raison de son pouvoir sucrant aux alentours de 300, 15 mg de saccharine remplacent 5 g de saccharose. En ce qui concerne les cyclamates, ils sont limités à un usage pharmaceutique sous les appellations de Sucrum® et de Sucaryl®. L’aspartame Il a été découvert en 1966 par des chimistes britanniques. C’est un dipeptide méthylé constitué par de l’acide aspartique et de la phénylalanine. L’aspartame a un pouvoir sucrant qui est 150 à 200 fois supérieur à celui du saccharose. Ceci signifie que 5 g de saccharose peuvent être remplacés par 25 à 30 mg d’aspartame. Il peut être utilisé isolément sous forme de comprimés ou de poudre, la forme commerciale la plus commune étant le Canderel®. Il est largement utilisé dans les boissons et les produits alimentaires dits « allégés » : sodas light, yaourts, entremets et crèmes glacées allégés. Sa consommation ne doit pas dépasser 40 mg/kg de poids et par jour ce qui est l’équivalent de 500 à 600 g de sucre par jour. Cette limite supérieure a peu de chance d’être dépassée en dehors d’une consommation non raisonnée de boissons ou de produits allégés.  À titre d’exemple, 1 litre de soda light apporte en moyenne 240 mg d’aspartame. Il existe des variations importantes de concentration d’une boisson à l’autre et pour une même boisson d’un pays à un autre, mais la concentration maximale admissible dans les sodas light est de l’ordre de 600 mg/l. Les industriels utilisent en général des concentrations qui sont 3 à 6 fois plus faibles que la concentration maximale admissible. À titre d’exemple, la dose maximale journalière admissible (2,4 g) pour un sujet de 60 kg serait atteinte si le consommateur buvait quotidiennement 10 litres de soda light titré à 240 mg/l. De manière plus générale, la quantité maximale d’aspartame qui est admissible dans les boissons et les aliments a été fixée à 100 mg/100 kcal.  La dangerosité potentielle de l’aspartame, alléguée par ses adversaires inconditionnels sera discutée ultérieurement de manière exhaustive, mais d’ores et déjà il convient de souligner que les risques sont fort improbables. En effet, l’aspartame est dégradé par l’organisme. Le clivage de la liaison peptidique entre les deux acides aminés libère l’acide aspartique et la phénylalanine qui sont ensuite métabolisés. La phénylalanine peut poser problème en cas de phénylcétonurie. La consommation de l’aspartame est totalement déconseillée chez les enfants souffrant de cette affection. Par principe de précaution, il est préférable d’éviter la consommation d’aspartame chez les tout petits. Chez la femme enceinte et allaitante, la consommation est autorisée et ne pose pas de problème particulier. Le néotame C’est un dérivé de l’aspartame. Son pouvoir sucrant est considérable (7 000 à 13 000 fois supérieur à celui du saccharose). Bien qu’il possède la même structure dipeptidique que l’aspartame, sa dégradation en phénylalanine et en acide aspartique est empêchée par la présence de trois radicaux méthyl supplémentaires. Pour cette raison, sa consommation ne pose pas de problème chez les sujets phénylcétonuriques. De toute manière cet édulcorant n’est pas utilisé en France. L’acésulfame de potassium Il a une structure chimique qui le rapproche de la saccharine. Contrairement à l’aspartame, il n’est pas dégradé au cours de la cuisson. Le sucralose C’est un dérivé synthétique du saccharose sur lequel 3 radicaux hydroxyles ont été remplacés par 3 atomes de chlore liés par liaison covalente au reste de la molécule2. Le pouvoir sucrant du sucralose est très élevé (600), mais en France le produit a été retiré des grandes surfaces en raison des risques potentiels liés à la structure du produit. Bien que 80 % du sucralose ingéré ne soit pas absorbé par le tube digestif, 20 % traverse la barrière intestinale. La majorité du sucralose absorbé est métabolisée par le foie pour être excrétée par voie biliaire. Un très faible pourcentage, de l’ordre de 2 %, est éliminé par voie urinaire. La plus grande crainte est liée à la présence d’atomes de chlore. Son utilisation devient de plus en plus confidentielle et pourrait être déconseillée dans les années à venir. Le rébaudioside A (Stevia) La nouvelle coqueluche des édulcorants est un produit naturel qui est extrait d’une plante originaire d’Amérique du Sud (Stevia rebaudiana). C’est dans les feuilles que se trouve cet édulcorant dont le pouvoir sucrant est 200 à 300 fois supérieur à celui du sucre de table. À ce jour, le rébaudioside A n’a montré aucun signe de toxicité ou d’effets secondaires. Cette substance est déjà utilisée depuis plusieurs années au Japon. Les États-Unis ont adopté cet édulcorant plus récemment. Il est actuellement autorisé dans les boissons et les aliments par les autorités sanitaires françaises. Son usage est encore peu répandu car son coût de fabrication est plus élevé que celui de l’aspartame. La diminution de ce coût pourrait conduire à une extension rapide de son utilisation car la reproduction du goût sucré est excellente et l’innocuité du produit paraît garantie. Les études effectuées chez l’animal n’ont pour l’instant montré aucune toxicité ni aucun problème potentiel mutagène. Une faible partie du rébaudioside est absorbée par le tube digestif après son ingestion. La fraction absorbée est métabolisée au niveau du foie(5). Une partie est éliminée rapidement par voie biliaire, l’autre est glycurono-conjuguée avant d’être excrétée directement par voie urinaire. Quoiqu’il en soit, le rébaudioside ne subit aucune dégradation susceptible de fournir des calories à l’organisme. La DJA a été récemment révisée à la hausse, avec un niveau qui reste toutefois faible : 4 mg/kg de poids. La controverse sur l’aspartame  L’aspartame, qui est l’édulcorant le plus utilisé dans le monde, a une DJA fixée à 40 mg par kilogramme de poids corporel soit 500 g en équivalent sucre ou cent morceaux de sucre par jour pour un adulte de poids normal. Aujourd’hui l’aspartame est l’édulcorant le plus répandu dans les boissons et les produits alimentaires dits « allégés ». Les sodas light, les yaourts, les entremets et crèmes glacées allégés en contiennent des quantités variables mais toujours dans les limites fixées par les directives officielles.  C’est en 1966 que l’aspartame fut découvert par des chimistes britanniques dans des conditions un peu fortuites qui rappellent celles de son ancêtre, la saccharine. Dans les années 1980, l’aspartame commença à être utilisé à grande échelle en dépit de controverses et d’attaques très médiatisées qui n’ont jamais cessé depuis sa commercialisation. De nombreuses plaintes ont été déposées à travers le monde, les plaignants rapportant des troubles tellement disparates que tous les doutes sont permis. Il y a quelques années est paru dans une revue grand public un article sur l’aspartame avec le titre suivant : « Le sucre qui rend fou ». L’article se fondait sur la déclaration de l’entourage d’une personne qui aurait présenté des troubles psychiatriques sévères après avoir bu 1 litre d’une boisson gazeuse édulcorée avec de l’aspartame. Il est difficile de croire que la consommation des 240 mg d’aspartame contenus dans cette boisson ait pu déclencher une crise de démence aiguë, alors que la DJA est de 2 400 mg pour une personne adulte de 60 kg.  Bien que les plaignants aient été toujours déboutés, l’aspartame reste l’objet d’attaques récurrentes sur sa prétendue sécurité d’emploi. Ses détracteurs fondent leurs arguments sur le fait que cette substance libère au cours de sa métabolisation un alcool connu pour sa toxicité, le méthanol. Pourtant, la métabolisation de 25 mg d’aspartame, qui remplace un morceau de sucre, ne libère que 1,9 mg de méthanol, quantité infime qui est éliminée dès qu’elle est produite. Ainsi, une personne qui consomme 1 litre de soda allégé produit 22,8 mg de méthanol (tableau 2). À titre de comparaison, un simple verre de jus de tomate du commerce apporte 50 mg de méthanol car cet alcool provient de la fermentation des fruits riches en pectine. Le méthanol est également présent dans le vin (100 à 300 mg/l) (tableau 2), mais cet alcool est toxique à des doses très largement supérieures aux quantités qui sont habituellement consommées. En petites quantités, le méthanol est rapidement éliminé par voie respiratoire, ou transformé en métabolites qui rejoignent le métabolisme général du cycle de Krebs.    La possible toxicité de l’aspartame par la voie du méthanol est donc un faux problème. Dans ces conditions, il est difficile de comprendre pourquoi la polémique se poursuit. En fait, la conviction des adversaires de l’aspartame est régulièrement réactivée par des procès d’intention plus ou moins gratuits et par des études scientifiques conduites avec une méthodologie laissant à désirer. Au rang des procès d’intention, citons les accusations de conflit d’intérêt concernant Donald Rumsfeld, ancien secrétaire général de la Maison Blanche et ministre de la défense de Gérald Ford et de George Bush. Il y a quelques années, les mauvaises langues avaient insinué qu’il aurait reçu une somme de 12 millions de dollars pour avoir facilité la vente à la firme Monsanto de la licence de l’aspartame par la société Searle, qui était propriétaire du brevet et dont Rumsfeld avait été le président.  Au rang des travaux scientifiques contestables, les trois dernières années ont été marquées par la publication de deux études parues dans deux revues médicales (American Journal of Clinical Nutrition, numéro du mois de juin 2010(6), et American Journal of Industrial Medicine, numéro du mois de décembre 2010(7)). Ces publications ont relancé la polémique autour de l’aspartame. La première est une étude danoise qui fait ressortir la présence d’un lien entre la consommation de sodas à base d’édulcorants et le risque d’accouchement prématuré. En prenant pour référence (risque = 1), les femmes enceintes ne consommant pas de boissons édulcorées, celles qui consomment plus de 1 boisson édulcorée par jour ont un risque égal à 1,35. Ce risque passe à 1,78 lorsque la consommation est supérieure ou égale à 4 boissons par jour (tableau 3).    Ainsi, le risque paraît nettement augmenté lorsque les résultats sont exprimés selon cette modalité, qui est désignée par les épidémiologistes et les statisticiens sous le terme de risque relatif. Sans entrer dans une discussion qui serait trop technique, les chiffres sont beaucoup moins probants lorsque les résultats sont exprimés en termes de risque absolu : fréquence des accouchements prématurés en fonction de la consommation de boissons édulcorées.  Dans l’article concerné (tableau 3), la fréquence des accouchements prématurés chez les femmes ne consommant pas de boissons édulcorées est de 4,4 % contre 7,9 % chez celles dont la consommation est supérieure ou égale à 4 boissons par jour.  Ainsi, l’augmentation des accouchements prématurés paraît beaucoup moins évidente lorsque les résultats sont exprimés en risque absolu (fréquence) qu’en termes de risque relatif.  Ce genre de manipulation est classique dans l’expression des résultats et permet de faire apparaître des résultats significatifs dans des études à la limite de la signification statistique. De plus, il est surprenant de voir que cette étude a été utilisée par certains pour porter une « alerte » sur l’aspartame alors que le mot aspartame n’a jamais été cité une seule fois dans les résultats de l’étude, les auteurs parlant de boissons édulcorées (mais avec quoi ?). Enfin, si le méthanol est le produit impliqué dans la toxicité de l’aspartame, comment se fait-il que l’étude n’ait pas pris en compte la consommation de certaines boissons (jus de tomate, vin, etc.) qui contiennent des quantités de méthanol autrement plus fortes que celles qui peuvent être libérées par les boissons édulcorées avec de l’aspartame (tableau 2).  Les conclusions faites par les auteurs de l’étude sont d’ailleurs beaucoup plus nuancées que celles portées par quelques « pseudo-experts » qui s’étaient agités autour de cette étude. La conclusion des auteurs de l’article se termine par la phrase suivante : « Nos résultats suggèrent la responsabilité des édulcorants dans les accouchements prématurés mais la reproduction de nos résultats dans une autre étude pratiquée par d’autres dans un autre lieu est indispensable ». Par cette phrase à la fois d’une parfaite vacuité scientifique et d’une certaine modestie, les auteurs expriment en termes détournés qu’ils n’ont rien démontré.  Dans ces conditions quel commentaire peut-on porter sur la deuxième étude publiée dans l’American Journal of Industrial Medicine en décembre 20107 et réalisée chez des rongeurs recevant des supplémentations en aspartame comprises entre 242 mg et 3 909 mg par kg de poids et par jour, c’est-à-dire très supérieures aux doses maximales autorisées chez l’homme (40 mg/kg/j). Ces doses ne sont jamais utilisées chez l’homme car il faudrait boire de 60 à 900 litres de sodas light par jour pour ingérer des quantités d’aspartame égales à 242 mg et 3 909 mg/kg/j.  Dans cette étude faite à des doses situées à des « années lumières » des quantités ingérées dans la vie de tous les jours, les souris mâles recevant les doses progressivement croissantes d’aspartame (mais pas les souris femelles, on ne sait pas pourquoi ?) ont développé davantage de tumeurs que celles qui n’en recevaient pas (tableau 4).       Autre résultat surprenant de cette étude, la survie des animaux recevant de l’aspartame a été identique à celle des animaux exempts de toute supplémentation.  Davantage de tumeurs ? Même courbes de survie ? Pourquoi les souris femelles seraient-elles protégées alors que les souris mâles ne le seraient pas? Pourquoi avoir utilisé des doses qui relèvent de la toxicologie ? Comprenne qui pourra ! L’European Food Safety Authority (EFSA) a d’ailleurs confirmé à plusieurs reprises, y compris en 2011 après la publication des 2 études précitées, que l’aspartame aux doses maximales journalières admissibles (DJA = 40 mg/kg/j) ne présentait pas de potentiel génotoxique ou carcinogène et qu’il n’y avait aucune justification pour procéder à une révision des évaluations précédentes.  Conclusion Les édulcorants intenses ne présentent pas de danger évident bien qu’il existe des différences entre les différents produits. De manière globale, on peut considérer que l’aspartame, l’acésulfame K et le rébaudioside A, à condition de rester dans les limites autorisées, restent des additifs alimentaires sûrs, même si l’aspartame est contre-indiqué en cas de phénylcétonurie. En revanche, la consommation de la saccharine, des cyclamates et du sucralose devrait faire l’objet d’une attention particulière. C’est pour cette raison que ces trois derniers produits ne sont pas utilisés dans les produits alimentaires dits « light ». Par ailleurs, l’aspartame (produit chimique non naturel) est l’objet d’une concurrence croissante de la part du rébaudioside A, substance naturelle extraite d’une plante appelée Stevia. Entre les deux, nul ne sait qui prendra le dessus dans les années à venir. L’indécision est telle que les firmes qui fabriquent l’aspartame commercialisent également des sachets à base de rébaudioside A ou d’extraits non purifiés de Stevia. En regardant les choses de plus près, il semble que la compétition entre ces deux édulcorants soit plus un problème économique que sanitaire car les deux semblent exempts d’effets secondaires néfastes. 

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème