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Société

Publié le 31 mai 2014Lecture 7 min

Le patient diabétique en voyage

B. BAUDUCEAU, Professeur du Val-de-Grâce

La très grande fréquence du diabète et de la banalisation des déplacements à l'étranger explique l'actualité du problème posé par le voyage d'un diabétique. L'existence de cette maladie chronique complique encore les questions posées par le touriste ou l'homme d'affaires qui doit quitter l'hexagone. Les réponses à apporter varient naturellement en fonction du lieu de destination mais aussi du type de diabète. Quoi qu'il en soit, ces informations doivent s'intégrer dans la prise en charge initiale et l'éducation thérapeutique de ces malades. Les fascicules résumant les informations essentielles constituent un support bien utile à ces patients. 

Les diabétiques doivent pouvoir effectuer des voyages internationaux presque sans limitation à condition que ce déplacement soit préparé et que les précautions indispensables soient prises au cours du voyage, lors du séjour et après le retour. Préparation du voyage Cette étape essentielle concerne à la fois le malade qui souvent connaît mal la région dans laquelle il va se rendre et le médecin, mieux capable d’envisager les différents problèmes susceptibles de se poser. Il est indispensable d’obtenir des renseignements fiables sur le pays de destination. Ces informations concernent notamment les conditions climatiques, le mode de vie qui sera adopté lors du séjour et l’infrastructure hospitalière disponible sur place. Un certain nombre de précautions doivent être recommandées aux patients diabétiques. Certaines sont identiques à celles des sujets non diabétiques comme la nécessité d’une prophylaxie antipalustre, la mise à jour des vaccinations et la prévention des affections transmissibles. La survenue de troubles digestifs ou d’un accès fébrile risquant de déséquilibrer gravement le diabète, la prévention de ces accidents justifie une vigilance toute particulière. Certaines mesures de prudence sont spécifiques pour ces sujets diabétiques. Il convient ainsi de recommander à ces malades d’équilibrer au mieux leur diabète avant le départ, d’éviter les séjours en brousse où les conditions de vie sont précaires et de ne pas voyager seul. La constitution d’une pharmacie et la rédaction d’une véritable « check list » éviteront bien des catastrophes, notamment chez les diabétiques traités par insuline. Ainsi, pour des séjours de courte durée, il est indispensable de prévoir une provision suffisante comportant les médicaments nécessaires et les fournitures indispensables à la surveillance du diabète. En effet, la multiplication des différents types d’insuline, la diversification des moyens d’injection et des lecteurs de glycémie rendent aléatoires les possibilités de ravitaillement sur place avec des produits parfaitement identiques. Il est enfin nécessaire de prévoir un conditionnement isotherme pour l’insuline en cas de séjour en pays tropical et de constituer une trousse d’urgence en prévision des hypoglycémies. Il convient enfin de recommander à ces malades de ne pas négliger un certain nombre de démarches administratives. Ainsi, la souscription d’une assurance permettant un rapatriement sanitaire est vivement souhaitable. Enfin, ces malades devraient disposer, outre du carnet de vaccination, d’une carte signalant qu’ils sont diabétiques et d’un certificat médical justifiant la possession de seringues et d’insuline. Le voyage Le mode de transport est susceptible d’entraîner un certain nombre de contraintes au patient diabétique. L’utilisation de moyens relativement lents comme l’autocar, le train ou le bateau met à l’abri du problème de décalage horaire mais peut entraîner des cinétoses capables de déséquilibrer gravement le diabète et d’induire de redoutables hypoglycémies. La longueur du trajet et la survenue de fréquents retards sont également sources de difficultés. Il est donc indispensable de disposer dans son bagage à main du nécessaire pour réaliser le contrôle glycémique, les injections d’insuline et la prise en charge d’une hypoglycémie. L’utilisation de la voie aérienne nécessite des précautions particulières. Ainsi, prévenir l’hôtesse de la survenue d’un éventuel malaise peut être utile si le diabète est instable et que le patient voyage seul. Il est recommandé de conserver en bagage de cabine une partie de la réserve d’insuline. La température en soute ne risque pas de dégrader le médicament mais la perte d’une valise est toujours possible. Il convient enfin de mettre en garde les malades porteurs d’une pompe à insuline car le passage sous les portiques de détection peut entraîner son dérèglement. Le sujet d’interrogation essentiel des diabétiques traités par insuline concerne celui du décalage horaire : - lorsque celui-ci est < 3 heures, il n’est pas nécessaire de prévoir de modification dans le schéma insulinique. Une collation supplémentaire, qui est d’ailleurs souvent prévue dans l’avion, permettra d’attendre le repas suivant ; - en revanche, au-delà de 3 heures, le problème se pose et nécessite un minimum de réflexion. Les règles essentielles reposent sur la conservation de l’heure du pays de départ, l’utilisation d’un analogue rapide associée à la prise des repas. La gestion des injections est naturellement fonction de l’importance du décalage horaire, de la durée du voyage et de sa direction. Un voyage d’Est en Ouest, qui allonge la journée, impose la réalisation d’injections supplémentaires d’analogue rapide. Le trajet de retour amènera, en fonction du schéma insulinique initial, à supprimer une injection d’analogue rapide ou à remplacer une injection d’insuline d’action intermédiaire par une injection d’analogue rapide. Ces artifices permettront au malade une adaptation immédiate aux nouveaux horaires. En ce qui concerne les diabétiques sous thérapeutique orale, les difficultés sont moindres et se bornent à respecter les intervalles de prise des biguanides et surtout des sulfamides afin d’éviter tout malaise hypoglycémique dont on connaît la gravité particulière. Lors du voyage, un certain déséquilibre du diabète n’est pas inhabituel en raison de ces contraintes d’horaires et du mode d’alimentation. Comme toujours, ce sont les malaises hypoglycémiques qui doivent être redoutés dans ces circonstances si bien que des glycémies un peu élevées doivent être acceptées, voire recommandées. Le séjour La surveillance régulière du diabète doit permettre d’éviter les grands déséquilibres glycémiques. Cependant, la survenue d’hypoglycémies ou d’épisodes d’acidocétose ne peut pas toujours être prévenue car des circonstances déclenchantes sont plus souvent rencontrées lors de ces voyages. La prise de boissons abondantes doit être ainsi recommandée en climat chaud, notamment chez les sujets âgés présentant un diabète de type 2. Ces précautions éviteront la survenue d’épisodes de déshydratation, de colique néphrétique, voire de coma hyperosmolaire. Toutes les mises en garde habituellement formulées s’appliquent plus encore chez le diabétique. En effet, la survenue d’événements mineurs, notamment d’ordre digestif, peut devenir catastrophique chez ces malades et imposer une hospitalisation d’urgence dans des conditions parfois précaires. Il convient donc d’insister sur les précautions à respecter scrupuleusement dans la consommation des aliments et des boissons. Le dépaysement des vacances s’accompagne d’une modification de la nature des aliments. Il est donc préférable de repérer les féculents locaux et de les substituer à ceux de la ration alimentaire habituelle. La décontraction n’excluant pas la vigilance, il convient d’éviter les fruits tropicaux trop sucrés et la prise immodérée d’alcool ou de glaces qui risquent de dégrader l’équilibre du diabète. Enfin, la modification des horaires des repas doit, dans certains pays, conduire à adapter le schéma insulinique. Les épisodes infectieux favorisés par le diabète et le séjour en région tropicale nécessitent d’être prévenus par une surveillance et des soins réguliers des téguments, notamment des pieds. Plus encore que chez les sujets non diabétiques, les bains en rivière ou la marche pieds nus sont à proscrire et l’exposition au soleil doit être limitée. La période des vacances est particulièrement propice au développement des activités sportives. Celles-ci doivent être encouragées au prix de quelques précautions élémentaires afin d’éviter la survenue d’hypoglycémies. Il convient ainsi de prévoir les collations supplémentaires, nécessaires avant et au cours des efforts prolongés. Il faut également recommander au diabétique de diminuer sa dose habituelle d’insuline du matin chaque fois qu’il pourra prévoir une activité physique assez soutenue dans la journée qui commence. La localisation des injections d’insuline nécessite d’être modifiée en fonction des groupes musculaires les plus sollicités lors des exercices physiques. Certains sports solitaires ou violents sont naturellement déconseillés et certains demeurent théoriquement interdits comme la plongée avec bouteilles, le parachutisme ou l’escalade. La fréquence des coronaropathies silencieuses incite enfin à une grande prudence vis-à-vis des sports intenses que le sujet n’a pas l’habitude de pratiquer en métropole. Le retour Le voyage de retour nécessite les mêmes précautions que le trajet aller et peut également entraîner un déséquilibre passager des glycémies. Ultérieurement, la notion de ce déplacement à l’étranger doit être conservée à l’esprit et signalée par le malade devant tout symptôme inhabituel comme une fièvre ou un épisode diarrhéique. En l’absence de manifestation clinique de ce type et lorsque le séjour s’est déroulé dans des conditions sanitaires acceptables, il ne semble pas nécessaire d’effectuer de « bilan de retour ». Conclusion Cette longue liste de recommandations et de mises en garde ne doit pas être considérée comme un argument dissuasif conduisant à proscrire tout voyage au diabétique. Bien au contraire, tout doit être fait pour que ces patients bénéficient d'une vie active pratiquement sans restriction. Sous réserve de précautions élémentaires qui relèvent le plus souvent du simple bon sens, les voyages internationaux doivent ainsi être encouragés. L'importance de l'éducation des diabétiques prend dans cette perspective une dimension supplémentaire et doit conduire le patient à une gestion autonome de sa maladie dans toutes les circonstances de la vie moderne.

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