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Congrès

Publié le 31 mar 2012Lecture 6 min

Comment prendre en charge un diabétique coronarien ?

M. DEKER


Cœur et diabète
Les enjeux cardiovasculaires sont majeurs chez les diabétiques, ce qui pose un double problème : celui d’évaluer le risque de morbi-mortalité cardiovasculaire et mettre en route une stratégie de prévention primaire ; celui d’appliquer la meilleure stratégie thérapeutique chez le diabétique qui présente un événement coronaire aigu, pendant la phase hospitalière et au-delà.

Le risque cardiovasculaire est bien corrélé au niveau de l’HbA1c et de la glycémie, en particulier postprandiale, chez le diabétique comme chez les sujets non diabétiques. Les études d’intervention récentes (ACCORD, ADVANCE, VADT) n’ont malheureusement pas démontré qu’un contrôle intensif du diabète permet de réduire significativement le risque de mortalité cardiovasculaire, comparativement à une prise en charge usuelle, laquelle est paradoxalement augmentée dans deux de ces études, contrairement aux résultats des études d’intervention ayant évalué les statines. Ces résultats décevants doivent toutefois être pondérés par les données à très long terme de l’étude UKPDS qui objectivent un effet bénéfique, certes modeste, sur la mortalité toutes causes, 10 ans après la période de contrôle intensif de la glycémie. Une incertitude persiste quant à la validité des équations de risque, dont les modélisations sont basées sur des études anciennes réalisées dans un environnement thérapeutique très différent de celui qui prévaut aujourd’hui. Dans ces études, les diabétiques ne bénéficiaient pas de toutes les thérapeutiques qui ont montré leur efficacité préventive, ils étaient relativement peu nombreux et le calcul de risque sur 10 ans ne tenait pas compte des perdus de vue ni des événements survenus antérieurement. Cela a conduit les investigateurs de l’étude ADVANCE à élaborer une autre équation de risque cardiovasculaire, mieux adaptée à la pratique, dont les déterminants indépendants sont l’âge, le sexe, la durée du diabète, la pression pulsée, la rétinopathie, la fibrillation atriale, l’HbA1c, le rapport albumine/ créatinine urinaires, le cholestérol non-HDL et l’hypertension artérielle (Eur J Cardiovasc Prev Rehabil 2011 ; 18 : 393-8). Prise en charge de la glycémie au décours d’un SCA Non seulement le diabétique a un risque d’événements cardiovasculaires accru comparativement au non-diabétique, mais il risque davantage d’en mourir. Le registre GRACE, qui collige les données de près de 80 000 malades coronariens, a bien montré une surmortalité hospitalière et à distance des coronariens diabétiques, en particulier après un syndrome coronaire aigu (SCA) avec sus-décalage de ST. Hormis la prise en charge du SCA, qui ne diffère pas selon l’existence ou non d’un diabète, se pose le problème spécifique de la gestion de l’hyperglycémie chez un malade ayant un SCA. La glycémie à jeun à l’admission est d’ailleurs un meilleur prédicteur du risque de mortalité que la glycémie précédant la phase hospitalière. Sa valeur prédictive est encore plus élevée chez les sujets n’ayant pas de diabète connu que chez les diabétiques déjà diagnostiqués et traités. L’hyperglycémie est également prédictive d’un risque d’insuffisance cardiaque, de choc voire d’hémorragies majeures dans l’évolution d’un SCA. La correction de la glycémie par la solution glucose-insuline-potassium (GIK) a définitivement été abandonnée à la phase aiguë du SCA. Il n’est même pas certain que l’insuline soit indispensable. Les essais d’insulinothérapie à la phase aiguë n’ont pas démontré de réduction de la mortalité ; le risque d’hypoglycémie sous traitement insulinique pourrait expliquer l’absence de bénéfice démontré de ce traitement, quoique les hypoglycémies iatrogènes n’aient pas nécessairement la même signification que les hypoglycémies spontanées. Parmi les malades hospitalisés pour un SCA, on dénombre environ un tiers de sujets ayant un diabète connu, mais aussi un tiers ayant une intolérance au glucose. Ces derniers devront être évalués pendant la phase hospitalière et après la sortie, et pris en charge précocement car la glycémie reste un prédicteur de mortalité à distance, même chez les non-diabétiques. La prise en charge optimale des patients diabétiques ou hyperglycémiques présentant un SCA a fait l’objet d’un consensus conjoint SFD/SFC 2012 : – à la phase aiguë, chez un sujet non identifié comme diabétique, ayant une glycémie > 1,80 g/l, il convient de débuter une insulinothérapie ; – le lendemain de l’admission, faire une HbA1c et une GAJ : si l’HbA1c est > 6,5 %, le malade est considéré comme diabétique et doit être pris en charge conjointement par un diabétologue ; – si l’HbA1c est < 6,5 %, prévoir une hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO) à la sortie. Les recommandations de la Société européenne de cardiologie 2012 vont dans le même sens : – mesurer la glycémie à l’admission et répéter la mesure chez les diabétiques et les hyperglycémiques ; – l’objectif est une glycémie < 2 g/l, en évitant les hypoglycémies, si nécessaire en débutant une insulinothérapie ; – éviter les perfusions de GIK ; – faire une GAJ et une HbA1c, voire une HGPO à la sortie ; – planifier une prise en charge spécifique en diabétologie et des traitements de prévention secondaire. L’insuline est-elle indispensable après un SCA ? Le choix du traitement hypoglycémiant après un SCA dépend du profil métabolique du patient. L’étude DIGAMI, après environ 4 ans de suivi, n’a pas montré de différence de mortalité selon le type de traitement hypoglycémiant (insuline ou metformine). La metformine n’est pas contre-indiquée après un SCA en l’absence d’insuffisance rénale ; le registre REACH a même montré qu’elle est associée à une diminution de la mortalité totale, y compris chez les malades ayant une altération de la fonction ventriculaire gauche ou de la fonction rénale. Les recommandations sont en train d’évoluer : la metformine pourrait être autorisée jusqu’à une clairance ≥ 45 ml/min, sous réserve d’une surveillance appropriée de la fonction rénale, et jusqu’à ≥ 30 ml/min à mi-dose, mais en deçà il ne faudrait pas débuter un traitement par metformine. Parmi les sulfamides ne devraient être utilisées que les molécules récentes, type gliclazide qui présente un moindre risque. Il n’existe aucune donnée spécifique concernant l’emploi des glinides et peu de preuves concernant les inhibiteurs de l’alphaglucosidase. La pioglitazone a bénéficié d’une étude spécifique qui a montré une réduction du risque de 30 % versus placebo. Les nouvelles classes d’antidiabétiques ne sont pas contre-indiquées chez le diabétique coronarien, d’autant que dans les modèles expérimentaux d’ischémie-reperfusion, le GLP-1 a démontré sa capacité à limiter la taille de l’infarctus et que certaines études pilotes plaident en faveur d’un bénéfice des incrétinomimétiques en post-infarctus. Une métaanalyse des données des inhibiteurs de DPP-4 montre une réduction de 30 % des événements cardiovasculaires majeurs, quels que soient la durée du suivi, le type de comparateur et la nature du produit. Il faudra toutefois attendre la confirmation définitive apportée par les études spécifiques en cours avec ces produits. En particulier, l’étude SAVOR-TIMI 53 évalue l’effet de la saxagliptine (2,5 ou 5 mg/j) sur la survenue des événements cardiovasculaires majeurs chez des patients diabétiques à haut risque, comparativement au placebo, avec un objectif de non-infériorité et possiblement de supériorité. Chez un diabétique connu insuffisamment contrôlé avant la survenue du SCA, la réévaluation du traitement devra tenir compte du contexte clinique, des objectifs souhaitables, tout en évitant les hypoglycémies, ce qui justifie amplement la place des nouveaux antidiabétiques tels que les inhibiteurs de la DPP-4. Symposium réalisé avec le soutien de BMS/AstraZeneca et la participation de J.-F. Gautier (Paris), P. Gourdy (Toulouse) et P.-G. Steg (Paris). Cœur & Diabète, 11 février 2012, Paris.

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