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Études

Publié le 30 nov 2015Lecture 5 min

Inhibiteurs de SGLT-2 : la surprise de l’étude EMPA-REG

B. CHARBONNEL, Université de Nantes


Le moment fort de la récente EASD de Stockholm, en septembre, a été la présentation, très attendue, de l’étude EMPA-REG. Il s’agissait de la première étude dite de sécurité cardiovasculaire avec un inhibiteur de SGLT-2 (i-SGLT-2), en l’occurrence l’empagliflozine de Boehringer Ingelheim-Lilly.

Les études précédentes de sécurité cardio vasculaire, avec l’insuline glargine pour l’étude ORIGIN, avec différents inhibiteurs de DPP-4 (i-DPP-4) pour les études SAVOR, EXAMINE et TECOS, avaient été intéressantes car elles avaient démontré la sécurité cardiovasculaire de ces médications antidiabétiques, mais elles n’avaient pas soulevé l’enthousiasme, faute d’avoir démontré un bénéfice en comparaison avec le placebo. Certes, ce n’était pas le but de ces études qui était, à niveau glycémique égal entre les deux bras, de montrer que le nombre des événements était le même que sous placebo, autrement dit une bonne sécurité. Chacun espérait néanmoins un bénéfice, même si le rationnel d’un bénéfice non lié à la baisse glycémique, en quelque sorte un effet pléiotrope, ne reposait pas sur un rationnel fort. Ceci dit, l’absence d’un tel bénéfice avait tout de même entraîné une certaine déception.   D’où la « standing ovation » qui a accueilli les résultats de EMPA-REG : le critère composite primaire de réduction du MACE (mort cardiovasculaire, infarctus du myocarde non mortel, AVC non mortel) a été atteint, avec une supériorité de l’empagliflozine sur le placebo ; surtout, une réduction spectaculaire de la mortalité, à la fois mortalité cardiovasculaire et mortalité toutes causes, a été démontrée sous empagliflozine.   Le dessin de l’étude EMPA-REG ressemble de près à celui des études précédentes, SAVOR ou TECOS par exemple : 7 020 patients diabétiques de type 2, en prévention cardiovasculaire secondaire, autrement dit ayant déjà présenté un événement cardiovasculaire, ont été randomisés soit vers l’empagliflozine, à deux posologies différentes, soit vers un placebo, en plus du traitement antidiabétique habituel, l’insuline dans 48 % des cas, ailleurs des antidiabétiques oraux, en demandant aux investigateurs, en aveugle, d’intensifier les traitements antidiabétiques, après le 6e mois, de telle sorte que l’HbA1c, après la première année, a été très peu différente entre le bras placebo et les deux bras empagliflozine, -0,24 % pour l’empagliflozine 10 mg et -0,36 % pour l’empagliflozine 25 mg. Rappelons que ces études dites de sécurité n’évaluent pas l’efficacité hypoglycémiante du médicament testé. On sait que les inhibiteurs de SGLT-2 réduisent un peu la pression artérielle, mais cette diminution, dans l’étude EMPA-REG a été modérée de -4 mmHg, non significative comparée au placebo. Bref, un profil métabolique conforme à ce qu’on pouvait attendre après les autres études de sécurité cardiovasculaire. D’où la surprise devant les résultats cardiovasculaires Une diminution significative de -14 % du MACE, le critère composite primaire, similaire dans les deux bras posologiques de l’empagliflozine, par rapport au placebo (figure 1). C’est un résultat important car les précédentes études de sécurité cardiovasculaire n’avaient rien montré de pareil mais l’amplitude du bénéfice, non négligeable chez des patients traités de manière optimale par statines et antihypertenseurs, reste néanmoins modeste. Ce qui fait le côté spectaculaire de EMPA-REG et pose d’ailleurs de nombreuses questions, c’est que cette diminution du MACE n’est pas liée, dans ce composite, à une quelconque diminution du risque d’infarctus du myocarde ou d’AVC (la tendance est même, pour l’AVC, dans la mauvaise direction), mais à une diminution majeure sous empagliflozine comparée au placebo, de la mortalité cardiovasculaire -38 % et de la mortalité toutes causes -32 % (figure 2). L’ampleur du bénéfice laisse pantois. Ajoutons, comme on le voit sur la figure 1, que ce bénéfice est précoce, les courbes divergent très tôt. Cette diminution de la mortalité cardiovasculaire se répartit entre une baisse de la mortalité par insuffisance cardiaque, par mort subite, ou par d’autres causes cardiovasculaires qui ne sont pas décrites (tableau). Une réduction spectaculaire du risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque : -35 %, bénéfice davantage attendu étant donné que l’inhibiteur de SGLT-2 est un diurétique, même si on ne s’attendait pas à cette ampleur. Comme pour les précédentes études de sécurité cardiovasculaire, notamment celles avec les i-DPP-4, au-delà de la sécurité (en l’occurrence du bénéfice) cardiovasculaire, cette étude permet d’évaluer les autres effets secondaires du médicament : on retrouve le risque d’infections génitales mais, dans le débat ouvert sur un risque de céto-acidose ou de risque fracturaire, il n’y a pas eu de différence entre l’empagliflozine et le placebo pour ces deux effets secondaires, au demeurant très rares. Voilà l’essentiel des données.   Figure 1. Diminution significative du MACE, le critère composite primaire, similaire dans les deux bras posologiques de l’empagliflozine, par rapport au placebo.  Figure 2. Diminution majeure sous empagliflozine comparée au placebo, de la mortalité cardiovasculaire tandis que l’infarctus du myocarde et l’AVC ne sont pas diminués.   Le temps des débats est ouvert Quels sont les mécanismes ? Ne sont sans doute pas, ou très peu, en cause la baisse glycémique ou la baisse de la pression artérielle (encore que cette dernière, 4 mmHg de systolique, ait pu jouer un rôle). On évoque « un effet osmotique », puisque l’i-SGLT-2 est diurétique et un tel effet pourrait rendre compte du caractère précoce du bénéfice. On évoque un effet antiarythmique en raison de la réduction du risque de mort subite… À vrai dire, on ne sait pas. Est-ce que ces résultats sont transposables à tous les diabétiques ? Pas forcément aux diabétiques tout-venant sans antécédent d’infarctus du myocarde, si le bénéfice est lié à un effet antiarythmique sur un cœur fragilisé. Rappelons que EMPA-REG s’adressait à une population de patients ayant présenté un événement cardiovasculaire antérieurement. Est-ce que ces résultats sont transposables aux autres i-SGLT-2 ? Sans doute, mais la rigueur scientifique oblige à attendre les résultats des études en cours avec la dapagliflozine et la canagliflozine. Est-ce que ces résultats vont changer les recommandations ? Très vraisemblablement, mais peut-être pas tout de suite, après leur confirmation par les autres études en cours. Est-ce que ces résultats vont changer les pratiques ?  On a tendance à dire oui.   En tout cas, ces résultats imposent aux autorités françaises, bien frileuses jusque-là, la mise à disposition des médecins et des patients français des i-SGLT-2.    

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