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Thérapeutique

Publié le 30 nov 2010Lecture 6 min

Les inhibiteurs de DPP-4 : points communs et différences

H. DUEZ, B. STAELS, Université Lille-Nord de France, Inserm, U1011 ; Institut Pasteur de Lille.

Un contrôle strict de la glycémie est important dans la prise en charge du diabète de type 2. Les recommandations actuelles préconisent en première intention des mesures hygiénodiététiques, et proposent de débuter un traitement antidiabétique oral avec la metformine. En cas de diabète non contrôlé, la metformine sera prescrite en combinaison avec d’autres antidiabétiques parmi lesquels les thiazolidinediones, les sulfonylurées ou l’insuline. Cet arsenal se révèle souvent insuffisant à réduire efficacement et durablement les taux d’HbA1c en dessous de 6,5 à 7 %, et souvent s’accompagne d’effets secondaires importants. Ces dernières années ont vu l’arrivée de deux nouvelles classes thérapeutiques, les analogues du glucagon-like peptide-1 (GLP-1) et les inhibiteurs de la dipeptidyl-peptidase (DPP)-4 (ou gliptines) qui prolongent la demi-vie du GLP-1, dont les actions biologiques se sont révélées d’un intérêt pharmacologique certain dans le traitement du diabète de type 2.

Bases physiologiques de l’action hypoglycémiante des inhibiteurs de la DPP-4   Le GLP-1 est un peptide sécrété dès les premières minutes de la prise alimentaire par l’intestin. Il augmente l’insulinosécrétion en réponse à une charge orale en glucose (effet « incrétine »). Il favorise également l’utilisation du glucose et diminue la sécrétion de glucagon, permettant ainsi d’inhiber la synthèse hépatique du glucose, ces différents mécanismes concourant, au côté de l’action insulinotrope, à la diminution de la glycémie (figure 1). Figure 1. Actions biologique du GLP-1. Le GLP-1 agit directement au niveau des cellules b du pancréas pour augmenter la synthèse et la sécrétion d’insuline en réponse au glucose, et exercer des effets bénéfiques sur la néogenèse, la prolifération et la survie des cellules b. D’autres actions du GLP-1 ont été décrites (captation du glucose par le muscle, effets cardioprotecteurs et de vasodilatation, ralentissement de la vidange gastrique et diminution de l’appétit). Le GLP-1 exerce des effets bénéfiques sur les cellules du pancréas (en augmentant leur néogenèse, leur prolifération et en améliorant leur survie) ; il ralentit la vidange gastrique et diminue l’appétit, des actions qui participent à l’amélioration du contrôle métabolique (figure 1). Chez les diabétiques de type 2, les taux plasmatiques de GLP-1 sont diminués, alors que son action insulinotrope est conservée. Dès lors, une stratégie visant à prolonger et/ou à renforcer son action est intéressante dans le contrôle de la glycémie. Cependant, la demi-vie du GLP-1 est très courte, de l’ordre de 1 à 2 min du fait, en grande partie, de sa dégradation par la DPP-4 (figure 2). Pour donner un ordre de grandeur, seuls 25 % du GLP-1 sécrété par l’intestin atteignent la veine porte, et 10 à 15 % seulement se retrouvent dans la circulation générale. L’une des deux approches pour contourner ce problème a consisté à développer des inhibiteurs de la DPP-4. La sitagliptine, la vildagliptine, et depuis peu la saxagliptine (NDLR*), sont actuellement sur le marché français. Plusieurs autres (alogliptine entre autres) sont soit autorisées sur le marché américain, soit en cours de développement. Figure 2. La dipeptidyl-peptidase (DPP-4) dégrade le GLP-1. La DPP-4 clive préférentiellement des peptides présentant une alanine ou une proline en position antépénultième en N-terminal, ce qui est le cas du GLP-1. En inhibant la DPP-4, les gliptines augmentent la demi-vie du GLP-1 et prolongent son action. Effets cliniques des gliptines   Nous ne ferons ici que rappeler quelques points clés, sans vouloir être exhaustif. La sitagliptine et la vildagliptine se sont révélées efficaces sur la diminution de l’HbA1c avec une baisse significative d’environ 0,8 % en moyenne, et ce, de façon similaire en monothérapie et en association (tableau). Leur action est d’ailleurs d’autant plus importante que les taux de départ sont élevés. Il faut noter que, bien qu’aucune comparaison directe n’ait jamais été réalisée, la sitagliptine, la vildagliptine, et d’ailleurs aussi la saxagliptine, ont des effets comparables. Par ailleurs, sitagliptine et vildagliptine diminuent toutes les deux la glycémie à jeun et en phase postprandiale, avec d’ailleurs un effet plus marqué sur cette dernière. On observe aussi, dans un certain nombre d’études, une amélioration/préservation de la fonction b-pancréatique (notons cependant que ces études sont de durée relativement courte), ainsi que des effets bénéfiques, bien que modestes, sur les lipides plasmatiques. Globalement, peu d’effets secondaires ont été rapportés avec la sitagliptine comme avec la vildagliptine. Un atout bien réel des gliptines est qu’elles réduisent la glycémie sans induire de prise de poids et surtout sans incidence sur le nombre d’épisodes d’hypoglycémie grave, ce qui est cohérent avec ce que l’on connaît de leur mode d’action. Par ailleurs, elles sont bien tolérées sur le plan digestif. Les deux gliptines apparaissent donc satisfaisantes sur le plan de la sécurité, mais des études supplémentaires seront nécessaires pour conclure définitivement quant à leur innocuité à long terme, d’autant que si leur sélectivité pour la DPP-4 est bonne et si le risque lié à l’inhibition éventuelle d’autres protéines de la même famille (DPP-8/9, par exemple) semble écarté à la lumière des études menées à ce jour, d’autres substrats de la DPP-4 ont été identifiés in vitro sur la demi-vie desquels les gliptines sont susceptibles d’agir. Existe-t-il des différences entre gliptines ?   La DPP-4 se retrouvant sous forme soluble dans le plasma, l’efficacité des gliptines est donc principalement dictée par leur biodisponibilité (c’est-à-dire la fraction de la dose administrée se retrouvant dans le plasma) et leur distribution (libre ou liée). La concentration plasmatique maximale atteinte et la demi-vie de la molécule à la posologie utilisée vont ainsi directement affecter le pourcentage d’inhibition de l’activité DPP-4 et la durabilité de l’effet. La biodisponibilité de la sitagliptine et de la vildagliptine administrées oralement est bonne et non différente (87 % et 85 % respectivement), avec une concentration plasmatique maximale observée entre 1 à 4 heures. L’administration d’une dose unique (100 mg) de sitagliptine ou vildagliptine conduit à une inhibition de l’activité plasmatique de la DPP-4 de plus de 90 % pendant au moins 12 heures et de 80 % et plus à 16 heures (figure 3)1,2. Par ailleurs, l’administration répétée pendant 10 jours de la sitagliptine (100 mg) montre que la concentration plasmatique de sitagliptine est stable dès le 3e jour, et on observe, au 10e jour, une inhibition de l’activité DPP-4 plasmatique de plus de 90 % pendant 24 heures (figure 3)2. Le temps de demi-vie de la sitagliptine est de l’ordre de 8-12 h contre environ 4 h pour la vildagliptine. Toutefois, si les différentes gliptines, qui appartiennent à des familles chimiques différentes (figure 4), inhibent la DPP-4 de façon réversible, la vildagliptine (et la saxagliptine d’ailleurs) se lie de manière covalente à la DPP-4, ce qui pourrait aussi permettre d’augmenter la durabilité de l’inhibition de la DPP-4. En tous les cas, une adaptation adéquate de sa dose et de la fréquence des prises (2 fois/j contre une prise/j pour la sitagliptine) permet de pallier la plus faible demi-vie de la vildagliptine. Ces données indiquent que les deux molécules inhibent l’activité DPP-4 efficacement (à plus de 90 %) et qu’il existe peu de différence entre ces deux gliptines. La question d’une éventuelle conséquence des 10 à 15 % résiduels d’activité DPP-4 et de l’opportunité d’obtenir une meilleure inhibition reste encore entièrement ouverte. En corollaire, la question d’une différence éventuelle entre gliptines ne peut être tranchée que  par des études de comparaison directe. Figure 3. Pourcentage d’inhibition de la DPP-4 obtenu avec la sitagliptine et la vildagliptine. Pourcentage d’inhibition de l’activité DPP-4 durant 24 heures après une seule administration (A) ou au 10e jour (steady state) (B) après l’administration répétée de sitagliptine à différentes doses, (s) représentant la dose de 100 mg. (C) Pourcentage d’inhibition de l’activité DPP-4 durant 24 heures après une seule administration de vildagliptine 100 mg. D’après1,2. Figure 4. Structure des différentes gliptines. Conclusion et questions en suspens   En monothérapie ou en association, les gliptines font baisser les taux d’HbA1c et la glycémie à jeun et postprandiale. Elles sont neutres sur la prise de poids, ne provoquent pas d’épisodes graves d’hypoglycémie et sont bien tolérées. On a pourtant peu de recul sur leurs effets à long terme. Les données actuellement disponibles montrent une efficacité comparable des gliptines mais seuls des résultats de comparaison directe permettront de trancher cette question. Le GLP-1 mais aussi son produit de dégradation pourraient agir directement au niveau cardiaque et sur l’endothélium vasculaire. Si on connaît les effets des gliptines sur les facteurs de risque cardiovasculaire tels que le poids (neutres) et les lipides plasmatiques (amélioration modeste du profil lipidique), l’action des gliptines sur les complications micro- et macro- vasculaires du diabète fait actuellement l’objet d’études et il sera nécessaire de valider les effets des gliptines sur ces aspects. * NDLR : Depuis la rédaction de cet article, la famille des inhibiteurs de la DPP-4 s’est élargie avec la mise à disposition d’une troisième molécule, la saxagliptine. Cette dernière a même fait l’objet d’une comparaison à la sitagliptine, chef de file de cette famille. Pour des informations complémentaires, lire l’article « Comment s’y retrouver parmi les inhibiteurs de la DPP-4 ? », dont les données sont en partie tirées d’une conférence présentée par B. Staels.

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