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Ophtalmologie

Publié le 31 mai 2008Lecture 7 min

Prise en charge de l’œdème maculaire diabétique

K. ANGIOI, Hôpital de Brabois, CHU de Nancy, Vandœuvre-lès-Nancy

La rétinopathie diabétique (RD) reste une cause importante de malvoyance et la première cause de cécité chez les sujets de moins de 60 ans dans l’ensemble des pays industrialisés. On distingue la rétinopathie diabétique non proliférante minime, modérée, sévère et la rétinopathie diabétique proliférante dès l’apparition de néovaisseaux prérétiniens ou prépapillaires. Dans la classification de l’Alfediam, la plus utilisée en France, l’atteinte maculaire est classée à part : maculopathie diabétique œdémateuse (focale ou diffuse) et maculopathie ischémique1 (encadré).
L’œdème maculaire diabétique (OMD) est la principale cause de malvoyance.
Il concerne 10 % de la population diabétique et 30 % des diabétiques après 20 ans d’évolution. Sa  prévalence est liée à la durée du diabète, à la gravité de la rétinopathie diabétique, à l’hyperglycémie chronique et à l’hypertension artérielle.  Sa survenue est favorisée par certains gestes comme la chirurgie de cataracte et la réalisation d’une panphotocoagulation rétinienne.

Clinique et examens complémentaires On distingue l’OMD focal, l’OMD diffus et l’OMD tractionnel. L’OMD focal correspond à une exsudation focale à partir d’un ou plusieurs microanévrismes souvent localisés en extramaculaire. Il est souvent associé à des exsudats organisés en couronne autour des anomalies microvasculaires appelées formations circinées. Avec le temps, le risque est l’augmentation des exsudats et le développement d’un placard exsudatif fovéolaire entraînant une baisse d’acuité visuelle sévère et définitive. L’OMD diffus correspond à une hyperperméabilité de l’ensemble du lit capillaire maculaire. On distingue un aspect non cystoïde correspondant à un épaississement diffus de la rétine maculaire et un aspect cystoïde, épaississement rétinien maculaire avec un aspect de logettes intrarétiniennes. Son évolution est lente mais défavorable sur le plan visuel. L’OMD tractionnel est un œdème microkystique maculaire, le plus souvent diffus, avec une traction de la hyaloïde postérieure épaissie sur la rétine. L’OCT (Optical Coherence Tomography ou tomographie en cohérence optique) a considérablement amélioré la prise en charge de cette pathologie. Cet examen permet d’obtenir des coupes de la rétine maculaire avec une résolution de l’ordre de 10 µm et de mesurer précisément l’épaisseur de la rétine centrale. L’OM peut ainsi être diagnostiqué et quantifié. Les examens effectués lors de consultations successives autorisent des comparatifs précis et ainsi un suivi objectif de la pathologie. Figure 1. OCT normal. Prise en charge   La prise en charge générale De nombreuses études ont démontré l’influence de la glycémie et de la pression artérielle sur le développement et la progression de la rétinopathie diabétique. Le contrôle le plus strict possible de ces deux facteurs au long cours a un intérêt capital dans la prévention primaire et secondaire de la RD2-4. Un équilibre glycémique et tensionnel le plus strict possible dès le diagnostic du diabète reste aujourd’hui le meilleur traitement préventif de la rétinopathie diabétique, associé à une surveillance annuelle du fond d’œil. Figure 2. Œdème maculaire focal (photographie du fond d’œil). Le traitement ophtalmologique La prise en charge thérapeutique de l’œdème maculaire reste beaucoup plus difficile bien que les études aient prouvé l’effet bénéfique du laser argon. Cette méthode reste encore la méthode de référence bien que ses résultats ne soient pas totalement satisfaisants, en particulier en termes d’acuité visuelle. En effet, le laser permet tout au plus un ralentissement de la baisse d’acuité visuelle liée à l’œdème maculaire et, dans peu de cas, une amélioration significative. Le laser est plus efficace sur l’œdème maculaire focal que sur l’œdème maculaire diffus5. Le traitement a lieu en une seule séance en ambulatoire avec peu d’effets secondaires si ce n’est l’exceptionnelle survenue d’un impact dans la région fovéolaire lié à un mouvement du patient. Figure 3. Œdème maculaire diffus (photographie du fond d’œil). Traitement de l’OMD focal La photocoagulation focale extramaculaire est indiquée lorsqu’il existe une couronne d’exsudats pénétrant dans la région maculaire. L’OMD focal doit toujours être traité s’il menace la vision. Le but du traitement est de photocoaguler les anomalies microvasculaires responsables de l’exsudation. Les résultats sont bons avec une régression des exsudats en plusieurs mois. Traitement de l’OMD diffus La photocoagulation en quinconce ou grid maculaire est le traitement de l’œdème maculaire diffus et de l’œdème maculaire cystoïde. Des impacts sont  réalisés  sur toute la surface de l’œdème maculaire en épargnant les 500 microns centraux. Ce traitement est réservé aux yeux porteurs d’un œdème diffus ou cystoïde évoluant depuis plusieurs mois sans tendance à l’amélioration spontanée avec une acuité visuelle aux alentours de 5/10e Parinaud 4. Il permet une stabilisation de l’acuité visuelle ou un ralentissement de la baisse d’acuité visuelle mais rarement une amélioration. Traitement de l’OMD tractionnel Dans certains cas rares, environ 1 % des œdèmes maculaires diabétiques, il existe une traction vitréorétinienne qui joue un rôle pathogénique dans le développement de l’œdème. Une vitrectomie peut alors être envisagée qui permet une diminution de l’épaisseur rétinienne et une amélioration de l’acuité visuelle. En revanche, l’intérêt de la chirurgie dans les autres œdèmes maculaires sans traction reste à démontrer. Figure 4. Œdème maculaire diffus (OCT). Figure 5. Œdème maculaire diffus cystoïde. Figure 6. Œdème maculaire tractionnel (angiographie et OCT). Les nouveaux traitements de l’œdème maculaire   Les insuffisances du traitement laser en termes de résultats fonctionnels ont justifié la recherche de nouveaux traitements permettant d’améliorer l’acuité visuelle des patients atteints d’un œdème maculaire diffus diabétique. Récemment, sont apparues des alternatives thérapeutiques, la vitrectomie et la réalisation d’injections intravitréennes de corticoïdes. Figure 7. Laser sur une formation circinée (OM focal). Figure 8. Grid maculaire (laser sur un OM diffus). Les injections intravitréennes   Les injections intravitréennes de triamcinolone ont été initialement proposées dans d’autres pathologies ophtalmologiques entraînant un œdème maculaire. L’efficacité de ce traitement, qui permet une réduction anatomique de l’œdème maculaire en quelques jours, a été prouvée par plusieurs études chez des patients porteurs d’œdème maculaire diabétique6-9. • Ce traitement consiste en une injection intravitréenne de 4 mg de suspension de triamcinolone. Les résultats sont rapides avec une diminution de l’œdème maculaire obtenue en 1 à quelques semaines avec souvent parallèlement une amélioration de l’acuité visuelle10-12. Malheureusement, les effets sont transitoires avec réapparition de l’œdème maculaire dans les 3 à 4 mois qui suivent l’injection. Des réinjections sont possibles, mais avec un risque accru d’effets secondaires, dont les principaux sont la survenue d’une hypertonie oculaire, le plus souvent jugulée par un traitement médical, et d’une cataracte après plusieurs injections. L’endophtalmie (infection intraoculaire) est une autre complication redoutée dont le taux exact n’est pas connu mais semble proche de 1 pour 1 000. Des effets systémiques ne sont pas attendus : en effet, on peut estimer que la posologie de corticoïdes utilisée par injection équivaut à 5 mg de prednisone, sans risque accru d’effet systémique décelable. Il n’y a actuellement pas de recommandations d’utilisation de cette technique et on préfère l’utiliser chez des patients porteurs d’OMD diffus non tractionnel, réfractaire au laser avec une acuité visuelle inférieure à 5/10 et une épaisseur maculaire supérieure à 400 µm (mesurée grâce aux coupes OCT). L’intérêt et la sécurité au long cours des injections intravitréennes de triamcinolone pour traiter l’œdème maculaire diffus restent encore à démontrer. Cette indication doit être évaluée par des études prospectives et randomisées. • D’autres produits actifs ont été envisagés en injection intravitréenne. Les anti-VEGF (vascular endothelial growth factor) ont été développés récemment en ophtalmologie pour lutter contre les néovaisseaux choroïdiens dans la dégénérescence maculaire liée à l’âge. Ces médicaments peuvent avoir un intérêt théorique dans le traitement de l’œdème maculaire diabétique. Quelques succès à court terme ont été rapportés récemment dans la littérature13. Des études sont actuellement en cours pour connaître exactement la place de ce médicament dans la prise en charge de cet œdème maculaire.   La place de la chirurgie dans la rétinopathie diabétique La vitrectomie est proposée dans les rétinopathies proliférantes compliquées d’hémorragie vitréenne ou de décollement de rétine. En ce qui concerne l’OM, la vitrectomie est efficace dans les formes à composante tractionnelle mais reste encore en cours d’évaluation dans les formes non tractionnelles14.   Conclusion   Si la prise en charge de la RD proliférante est bien codifiée et les résultats de la panphotocoagulation rétinienne sont très satisfaisants à la fois sur le plan anatomique et sur le plan fonctionnel, la prise en charge de l’OMD demeure difficile. Le laser reste la méthode de référence dans la prise en charge de l’œdème maculaire. Les injections intravitréennes de triamcinolone ont suscité un certain enthousiasme, mais les résultats au long cours sont discutables. Les premiers résultats des injections d’anti-VEGF devront être confirmés. Nous bénéficions à ce jour de molécules qui permettent d’améliorer transitoirement la vision et on peut ainsi obtenir un certain gain de « temps de vue ». Mais il faut garder à l’esprit les effets secondaires potentiels surtout en cas d’injections multiples de corticoïdes. L’avenir repose peut-être sur des traitements combinés ou d’autres modes d’administration des médicaments. Mais en aucun cas, nous ne devons oublier la prévention de l’OMD qui passe par une optimisation du contrôle glycémique et tensionnel dès le début de la maladie diabétique, mais aussi dans les stades déjà évolués.

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