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Éducation-Législation

Publié le 30 nov 2009Lecture 8 min

Diabiroise, un réseau en marche !

P. MONGUILLON, coordinateur du réseau Diabiroise, Brest

L’éducation thérapeutique (ETP) est plus que jamais un sujet brûlant d’actualité :
Qui éduque réellement les patients en diabétologie ? Quelle est la part des hôpitaux, celle des cabinets médicaux ? Et les réseaux de soins dans tout cela ?
Chacun souhaite participer à l’éducation des patients diabétiques avec ses moyens et c’est peut-être la solution que de jouer la complémentarité entre les structures.
Malheureusement, les professions médicales et paramédicales sont assez cloisonnées et n’ont pas toujours appris à travailler ensemble. Nous manquons aussi d’outils pour savoir ce que les uns et les autres ont réalisé et plus encore ce que le patient en a retenu. Les établissements de santé sont eux-mêmes assez cloisonnés, même si une volonté d’ouverture apparaît ici ou là.

En 2004, à Brest, un petit groupe de travail a entamé une réflexion sur l’éventualité d’un réseau dans cette région. N’étant pas les premiers à nous lancer dans cette aventure, nous nous sommes appuyés sur l’expérience d’autres réseaux, notamment le réseau diabète 35 d’Ille-et-Vilaine. Des binômes de podologues, de pharmaciens, de diététiciennes, d’infirmières et de médecins généralistes se sont ainsi réunis régulièrement pour définir un projet qui a vu le jour début 2005 ; le binôme de diabétologues comprenait un médecin hospitalier, responsable du service d’endocrinologie au CHU et un médecin libéral actuellement coordinateur du réseau.   Développement du réseau Diabiroise   Après 4 ans d’activité, Diabiroise compte, parmi ses 392 membres professionnels de santé, 131 médecins généralistes (au 31/12/08), ce qui représente environ 1 médecin généraliste sur 3 dans notre secteur géographique (Nord-Ouest Finistère). Nous dépassons le chiffre de 700 patients inclus dans le réseau, soit environ 7 % de la population estimée des patients diabétiques du secteur. À la demande des professionnels de santé, pour limiter les déplacements de leurs patients, nous avons créé des séances d’éducation thérapeutique délocalisées dans les villes périphériques de Brest, en essayant d’impliquer au maximum les professionnels locaux. Néanmoins, tous les professionnels de santé n’ont pas pour objectif d’être des éducateurs et, pour ceux qui le souhaitent, le passage du rôle de soignant à celui d’éducateur n’est pas immédiat ; au-delà de la formation, il nécessite souvent un cheminement, une imprégnation avant l’animation des séances. C’est pourquoi les soignants du réseau participant à l’ETP des patients sont incités à suivre des formations pour acquérir des compétences nouvelles, non seulement en éducation thérapeutique mais aussi dans la gestion des groupes, qui représente une difficulté supplémentaire pour les professionnels de santé. Ils sont accompagnés dans la démarche par un éducateur plus expérimenté et suivent les premières séances en auditeur.   La formation pluriprofessionnelle au diabète est « à travailler ensemble »   Dès l’origine en 2004, il nous a paru capital de communiquer au maximum auprès des professionnels de santé sur l’intérêt du réseau, et de leur proposer des formations sur le diabète avant de débuter les séances d’éducation thérapeutique pour les patients. Ces formations sont avant tout pluridisciplinaires car elles doivent servir à décloisonner les professions, à faire en sorte que les professionnels se connaissent et se reconnaissent. Le deuxième objectif de ces formations pluriprofessionnelles est d’harmoniser les messages délivrés aux patients. Nous avons été heureusement surpris de l’engouement suscité par les formations proposées par le réseau, animées par des acteurs locaux : diabétologues libéraux et hospitaliers, podologues, diététiciennes, sur la base de documents communs mis au point avec le soutien actif des médecins du CHU. Ces formations ont permis aux médecins de découvrir certaines professions, notamment celle de pédicure-podologue et de comprendre leur travail. Il est intéressant de noter dans un travail de thèse sur les relations médecins généralistes/réseaux que les médecins généralistes adhérents du réseau ont placé la formation du réseau en seconde position après leur propre FMC (qui est très bien organisée à Brest) parmi 6 choix différents (figure 1). Dans le cadre de la même formation, les pédicures-podologues ont pu bénéficier de la partie théorique complétée d’une partie pratique dans le service de diabétologie au CHU. Lorsque l’expérimentation du forfait podologique a abouti récemment à la création de la lettre clé POD, les pédicures podologues ont pu faire valoir la formation acquise dans les réseaux sans laquelle ils ne peuvent actuellement prétendre à la cotation des actes dans la nomenclature. Enfin, la formation offerte dans les réseaux a un impact en dehors de ces derniers. Ainsi, un pédicure podologue ayant reçu une formation spécifique en diabétologie en fera profiter tous ses patients et pas seulement les adhérents des réseaux. Comment quantifier cet aspect à l’heure où tout doit être chiffré sous peine de disparaître ? Figure 1. Place de la formation proposée par le réseau Diabiroise parmi les offres locales. Que peuvent attendre les médecins généralistes d’un réseau de soins ?   Du temps d’éducation pour leurs patients La durée moyenne des consultations en France en médecine générale est d’environ 17 min (source : Observatoire de la SFMG 2009). Cela ne signifie pas que les médecins ne prennent pas suffisamment de temps pour aborder avec leurs patients des sujets tels que : « Le diabète : maladie et traitement ? », ou bien « Les complications du diabète : comment les éviter ? » ou encore « Comment intégrer l’activité physique au quotidien ? ». Cependant ces thèmes, qui sont développés lors des séances d’éducation thérapeutique, nécessitent de laisser du temps au patient pour échanger si l’on souhaite « faire de l’éducation thérapeutique » et non pas simplement « délivrer une information sur le diabète ». Nous offrons ce temps aux patients et pour une somme dérisoire, puisque l’adhésion annuelle leur coûte 2 e grâce au financement principal par l’Assurance maladie. Au total, c’est plus de 12 heures d’éducation thérapeutique regroupées par demi-journées dont les patients peuvent disposer à leur entrée dans le réseau. Par la suite, d’autres ateliers leur sont proposés en fonction de leur demande et des besoins perçus lors des contacts avec l’équipe du réseau (encadré). Par ailleurs, sommes-nous en tant que soignant les mieux placés pour répondre aux questions des patients qui nécessitent un vécu que nous ne pouvons pas revendiquer puisque nous ne sommes pas diabétiques ? La possibilité de réponse d’un patient à un autre constitue un argument majeur pour cette forme d’éducation. Au-delà des avantages économiques évidents, le groupe se prête davantage à l’éducation thérapeutique que l’entretien individuel car il est plus facilement modélisable et évaluable. Un partenaire pour réaliser l’éducation des patients Nous pensons que le rôle du médecin traitant dans ce domaine consiste à identifier les besoins du patient en discutant avec lui des difficultés qu’il rencontre à propos de sa maladie : problème de poids, observance des mesures hygiénodiététiques et médicamenteuses, difficultés d’utilisation de l’insuline, etc. Le réseau est à sa disposition et à celle du patient comme une sorte de « boîte à outils » pour les aider à surmonter ou résoudre, même partiellement, les difficultés rencontrées.   Une aide à la motivation et à la prise en charge diététique des patients Les résultats d’une étude sur la perception du réseau par les médecins généralistes adhérents montrent que les médecins classent en premier l’éducation thérapeutique suivie de très près par la re-motivation du patient et l’accès à la diététique (figure 2). Dans ce domaine, nous proposons un véritable parcours diététique incluant des séances en groupe et des consultations individuelles réalisées à l’extérieur du réseau par des diététiciennes « agréées » par le réseau, c’est-à-dire ayant suivi au minimum la formation pluriprofessionnelle de 2 jours. Par ailleurs, sont proposés différents ateliers dont les thèmes ont été définis à partir de la demande des patients pour une part ou bien qui répondent à une volonté de mise en pratique des conseils reçus (atelier cafétéria, faire des menus équilibrés sur une semaine, atelier cuisine, etc.). Figure 2. Bénéfices apportés par le réseau du point de vue du médecin. Un rapport différent avec les patients La figure 3 présente les réponses classées par fréquence à la question sur l’évolution ressentie par le médecin dans ses rapports avec son patient. Parmi les items, l’amélioration de la communication avec le patient est peut-être celui qui est le plus facile à percevoir ; la meilleure connaissance du vocabulaire médical par le patient est sans doute une des raisons qui facilite la communication. Figure 3. Évolution des rapports patients/médecins constatés par le médecin. La communication avec le réseau Nous nous sommes engagés en 2008 auprès de l’union régionale des médecins libéraux de Bretagne (URL) dans le développement d’une messagerie sécurisée, qui devrait permettre de communiquer avec les médecins (informatisés à plus de 90 % dans la région) par un simple mail qui ira, sans le déranger, se glisser dans le dossier patient informatisé pour être lu au moment où le patient viendra en consultation. Au-delà de l’information légitime du parcours de son patient dans le réseau, le médecin peut ainsi assurer une continuité dans la démarche d’éducation.   Diabiroise, est-ce que « ça marche » ?   En d’autres termes, quel est le bon critère pour dire qu’un réseau « marche » ou « ne marche pas » ? Le nombre de patients ? L’expansion régulière du réseau est conforme à nos engagements initiaux (dossier de demande de financement) et nos moyens ne nous permettraient pas d’aller plus vite sans détériorer la qualité de la prestation éducative. Le nombre de professionnels ? Concerner un médecin sur 3 dans notre secteur ne nous paraît pas ridicule ; surtout, nous respectons ceux qui ne souhaitent pas adhérer. La satisfaction des patients ? Les résultats d’une enquête réalisée en 2007 sont très encourageants puisque 98 % des patients se disent satisfaits globalement du réseau et que 88 % attribuent cette satisfaction aux séances d’ETP. La réalisation des examens de surveillance du diabète ? Comme cela a été déjà démontré dans plusieurs réseaux de l’ANCRED, les recommandations sont mieux suivies dans le cadre des réseaux diabète. Qu’en est-il des critères médicaux « durs » tels que l’HbA1c ? Il faut être prudent dans ce domaine puisqu’il s’agit d’un recueil de données rétrospectif ; néanmoins, la figure 4 semble indiquer que la proportion de patients ayant des HbA1c élevées (> 8 %) diminue au fil du temps dans le réseau. Et l’évaluation externe du réseau ? Depuis 2004, nous réclamons une évaluation externe à chaque demande de financement, laquelle n’a jamais été décidée par nos financeurs. Figure 4. Évolution des HbA1c des patients adhérents au réseau entre 2005 et 2007. Conclusion   Comme beaucoup de réseaux diabète, Diabiroise contribue à la bonne prise en charge des patients par leur médecin traitant en l’aidant à : - accomplir la mission d’éducation du patient, coûteuse en temps et en privilégiant la dynamique de groupe ; - actualiser ses connaissances sur le diabète et son traitement ; - travailler avec les autres professionnels de santé impliqués dans le diabète. Cette mission n’est pas redondante avec celle des diabétologues libéraux ou hospitaliers car la pérennité des messages éducatifs nécessite l’harmonie et la répétition des messages. Le caractère pluriprofessionnel des formations prend ici tout son intérêt et ne nuit pas aux diabétologues qui sont les principaux animateurs de ces formations.

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