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Éducation-Législation

Publié le 31 aoû 2007Lecture 7 min

Diabète de type 1 et diabète de type 2 : des objectifs éducatifs différents

H. GIN, Université Bordeaux 2, Bordeaux

À l’heure où les discussions s’engagent pour une reconnaissance de l’éducation thérapeutique, il importe de bien en définir les objectifs concernant le patient diabétique. Il ne s’agit pas de quelque chose qui s’improvise mais bien d’un acte réfléchi avec des objectifs définis. Certes, la notion de diagnostic éducatif est importante, mais dans toute démarche médicale, l’acte thérapeutique ne peut survenir qu’après une étape de diagnostic clinique. Il ne peut pas y avoir de bonne médecine sans le respect de la démarche intellectuelle : signes, diagnostic, pronostic, traitement. L’éducation thérapeutique ne peut donc s’inscrire que comme dernière étape d’une médecine pratiquée dans le respect des règles de bonne pratique.

Signes   Ils sont représentés par le classique syndrome polyuro-polydypsique et l’amaigrissement, résumé dans les copies de nos étudiants sous le terme de « syndrome cardinal ». Cependant, la physiopathologie sous-tendant chacun de ces signes est souvent oubliée ; on peut probablement identifier d’un côté le syndrome hyperglycémique et de l’autre le syndrome de carence insulinique.   Le syndrome hyperglycémique Il est lié à l’hyperglycémie qui, très supérieure au seuil rénal du glucose, engendre la glycosurie qui entraîne la perte d’eau dans les urines, et induit la soif, le tout se résumant dans la notion de syndrome polyuro-polydypsique.   Le syndrome de carence insulinique Il se traduit par l’incapacité de l’organisme à maintenir un anabolisme. Il engendre donc l’amaigrissement portant sur les masses musculaires avec ensuite, en cas de carence absolue, l’apparition d’une cétose. Il faut cependant bien s’assurer qu’il s’agit d’un amaigrissement lié à la carence insulinique, c’est-à-dire portant sur les masses musculaires ; en effet, en cas de diabète de type 2, l’induction d’un grand syndrome polyuro-polydypsique par compensation de la soif par des boissons sucrées, engendre une glycosurie et donc une fuite calorique urinaire capable parfois d’assurer une balance énergétique négative ; mais alors la perte de poids porte essentiellement sur la masse grasse avec respect de la masse maigre, ce qui n’est pas le cas en situation de carence insulinique. La démarche sémiologique doit, grâce à l’interrogatoire, bien chercher à opposer anabolisme et catabolisme : – l’anabolisme se caractérise par la construction de l’organisme ou le maintien de sa masse maigre, l’insuline en est l’acteur majeur ; – le catabolisme se traduit en premier lieu par la perte de masse maigre et traduit alors la carence insulinique. Devant tout patient, il faut donc savoir s’il a eu tendance à grossir ou s’il a tendance à maigrir, et quand il a tendance à maigrir, savoir s’il perd de la masse grasse ou de la masse maigre : - un patient qui a tendance à grossir a obligatoirement une fonction pancréatique présente, puisqu’il faut de l’insuline pour être en anabolisme ; - par contre, un patient qui a tendance à perdre sa masse maigre est probablement en carence insulinique.   Les diagnostics   Le diabète en soi n’est pas un diagnostic mais un symptôme biologique (sucre dans les urines ou excès de sucre dans le sang) ; on doit donc aller plus loin et au minimun préciser type 1 ou type 2 : le type 1 est le prototype des diabètes pancréatoprives, que l’on oppose au diabète de type 2 qui est le prototype des diabètes par excès de travail pour le pancréas (insulinorésistance). Parmi les diabètes pancréatoprives : le diabète de la pancréatite chronique et bien d’autres, parmi les diabètes par entrave à l’action de l’insuline : les troubles de la glycorégulation rencontrés au cours du syndrome des ovaires polykystiques, du syndrome de Cushing et bien d’autres. Dans tous les cas, les diabètes pancréatoprives ont tendance au catabolisme et il importe de leur assurer un apport nutritionnel suffisant et surtout l’apport d’insuline qui n’est plus présente, pour enrayer l’évolution de la maladie ; en cas de diabète par entrave à l’action de l’insuline, il importe au contraire de tout faire pour épargner la fonction pancréatique et donc lutter contre l’insulinorésistance et généralement une restriction des apports nutritionnels devient nécessaire. Il apparaît donc bien que si les physiopathologies sont totalement différentes, il est hautement probable que les prises en charge thérapeutiques seront différentes et dans ces conditions que les actes d’éducation thérapeutique ne seront pas les mêmes.   Pronostic   Le pronostic est toujours le même, celui des complications dégénératives qui doit être analysé en fonction de l’espérance de vie du patient ; en cas de diabète pancréatoprive, une autre complication aiguë doit être prise en compte : celle de la carence insulinique absolue conduisant à la céto-acidose. Ce n’est qu’au terme de cette réflexion que la thérapeutique peut être choisie et en conséquence l’éducation thérapeutique commencée à être mise en place. Les physiopathologies étant différentes, les actes d’éducation sont probablement différents. Nous prendrons quelques exemples pour bien démontrer que cette démarche a toute sa valeur.   Éducation nutritionnelle   Il faudra, chez le patient présentant un diabète de type 1, respecter la ration calorique habituelle, alors qu’il faudra probablement pratiquer une restriction calorique chez celui qui présente un diabète de type 2 avec un excès pondéral. Cet élément, qui semble participer du bon sens, n’est en fait pas toujours mis en application. Souvent, lorsqu’un patient est traité par antidiabétiques oraux, il lui est dit que ses glycémies iraient mieux s’il venait à perdre du poids. Lorsqu’il s’agit d’un vrai patient diabétique de type 2 en surcharge pondérale, cette proposition, cette éducation thérapeutique à la diététique est vraie et efficace pour la santé du patient. En revanche, lorsque le patient n’a aucun antécédent de surpoids et aucun surpoids présent, même s’il est traité par antidiabétiques oraux, le seul objectif du médecin est de tout faire pour préserver sa masse musculaire ; il importe alors de bien préserver l’apport calorique et de ne pas le réduire, d’insister auprès du patient pour qu’il mange suffisamment même si cela s’accompagne d’une élévation des glycémies. Or malheureusement, souvent, on rencontre encore des pa-tients sans excès pondéral et chez lesquels une proposition de restriction calorique est faite, leur laissant croire que cela est le seul moyen d’éviter l’insulinothérapie ; c’est en fait probablement le meilleur moyen éducatif susceptible d’épuiser leur masse musculaire. Il existe donc bien des objectifs d’éducation thérapeutique diététique différents en fonction du type de diabète : faire manger suffisamment de calories à un patient diabétique de type 1 et réduire l’apport chez celui de type 2.   Les choses ne s’arrêtent pas au niveau calorique Dans le cas du diabète de type 1, il importera essentiellement que le patient connaisse les rations glucidiques, les équivalences (qu’il pratique ou non une insulinothérapie fonctionnelle). La majeure partie de l’acte thérapeutique sera donc centrée sur le principe de l’éducation à la connaissance des rations ou mieux des teneurs glucidiques des différents aliments. Dans le diabète de type 2, les choses sont toutes différentes. Bien sûr, il importe que l’apport glucidique soit maintenu dans des proportions de 45 à 50 %, mais il importe surtout de tout faire pour lutter contre l’insulinorésistance et donc de tout faire pour assurer le respect de la restriction vis-à-vis des apports lipidiques ; il faudra donc très spécifiquement orienter l’éducation nutritionnelle vers la connaissance des teneurs en lipides des différents aliments, sinon le patient en restera aux notions de beurre et huile, ce qui ne représente qu’une partie du problème des lipides dans l’alimentation. On voit donc que l’éducation thérapeutique nutritionnelle d’un patient diabétique de type 1 consiste à insister sur une notion de connaissance de composition des aliments glucidiques alors que l’éducation thérapeutique du diabète de type 2 a pour but de lutter essentiellement contre l’apport lipidique et en conséquence de bien connaître les compositions lipidiques des différents aliments, particulièrement ceux de fabrication industrielle mis aujourd’hui à la disposition de nos concitoyens.   Activité physique   Un autre exemple de différence d’objectifs éducatifs entre le type 1 et type 2 est concrétisé par l’activité physique : - l’activité physique est un véritable instrument thérapeutique, un outil médicamenteux dans le cadre du diabète de type 2 ; - c’est par contre uniquement quelque chose qu’il faut apprendre à gérer pour un patient diabétique de type 1, quelque chose qui, comme pour tout un chacun, participera à son état de santé générale, mais qui en aucun cas ne participera au traitement de son diabète en termes d’équilibre glycémique. Pour le patient diabétique de type 2, il va falloir absolument qu’il intègre l’activité physique dans sa thérapeutique ; cela veut dire que l’activité physique doit être un acte régulier, auquel on donne la même valeur qu’une prise médicamenteuse. Pour un patient diabétique de type 1, l’activité physique ne s’intègrera pas dans l’outil thérapeutique susceptible de réguler la glycémie mais au contraire dans l’acte de la vie quotidienne qui peut parfois compliquer l’équilibre métabolique ; il faudra en fait que le patient diabétique de type 1 apprenne à gérer soit son insuline soit son alimentation, soit les deux lorsqu’il voudra pratiquer une activité physique supplémentaire au titre du bon sens et de la santé générale, mais cette activité physique ne représentera pas un moyen de thérapeutique pour la glycémie. Elle n’a donc, dans ces cas, pas besoin d’être régulière, quotidienne et intégrée à part entière dans la thérapeutique, mais elle devra être comprise comme devant être bien gérée pour ne pas déséquilibrer le diabète.   Au total   Il apparaît donc, à travers ces deux exemples de raisonnement physiopathologique, que l’acte éducatif thérapeutique d’un patient diabétique de type 1, n’est pas celui d’un patient diabétique de type 2, que les diagnostics doivent d’abord être portés avant de commencer à discourir. Ce n’est qu’après un diagnostic médical précis, que l’acte éducatif thérapeutique efficace sera envisageable, et sera différent en fonction du diagnostic porté ; tout ceci est évident, mais encore faut-il ne pas oublier que diabète est un symptôme et que type 1, type 2 ou autre forme est un diagnostic ; l’acte éducatif étant souvent confié à l’équipe paramédicale, il faut donc lui donner un diagnostic et des objectifs adaptés à la situation clinique du patient.

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