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Insuline

Publié le 29 fév 2008Lecture 8 min

L’étape de l’insulinothérapie dans le diabète de type 2

H. HANAIRE, hôpital Purpan, CHU de Toulouse

Comparativement à la version précédente de 1999-2000, les nouvelles recommandations de prise en charge du diabète de type 2 publiées fin 2006 proposent une utilisation des traitements médicamenteux plus précoce (mise en route de la monothérapie dès que l’HbA1c dépasse 6 %), plus rapidement incisive (passage à la bithérapie orale dès que l’HbA1c dépasse 6,5 %), et propose la trithérapie orale ou le recours à l’insuline dès que l’HbA1c dépasse 7 %1. L’objectif à ce stade est de ramener l’HbA1c en deçà de 7 %. Ce qui change, finalement, c’est surtout l’incitation forte à ne pas tarder à passer à l’étape thérapeutique suivante, quand le traitement actuel devient insuffisant pour atteindre l’objectif d’HbA1c.

Il ne faut néanmoins pas négliger de s’enquérir à chacune des étapes de l’application des mesures d’hygiène de vie qui ont été proposées, de l’observance du traitement et, de façon générale, de l’adhésion du patient au programme de prise en charge qui lui est proposé. Si l’on ne s’assure pas de ces éléments, on peut être conduit à proposer une escalade thérapeutique dont les résultats ne seront peut-être pas à la hauteur des attentes.   Pourquoi l’insulinothérapie devient-elle nécessaire chez le diabétique de type 2 ?   La physiopathologie du diabète de type 2 associe, d’une part, une résistance à l’action de l’insuline et, d’autre part, des anomalies de la sécrétion d’insuline. La perte progressive de la fonction cellulaire β et de la production d’insuline au fil des années (figure 1) explique que le recours à l’insuline devienne nécessaire après plusieurs années d’évolution de la maladie et ce, malgré un traitement progressivement bien adapté. Figure 1. Perte progressive du potentiel de sécrétion d’insuline (d’après UKPDS 16, Diabetes 1995). Échec de la bithérapie : insuline ou trithérapie orale ?   Quand, malgré une bonne observance des mesures d’hygiène de vie (attestée notamment par l’absence de prise de poids récente) et une bithérapie orale prise à doses maximales (le plus souvent en France, il s’agit de l’association metformine-sulfamide ou glinide, mais cela peut aussi être une association comportant une glitazone ou un inhibiteur des alpha-glucosidases), l’HbA1c atteint ou dépasse 7 %, il est recommandé de passer à une trithérapie orale ou de débuter l’insuline.   La trithérapie orale… Chez un patient dont l’HbA1c devient supérieure à 7 % sous une association usuelle biguanide-sulfamide, le choix d’une trithérapie orale avec l’ajout d’une glitazone peut être proposé avec de bonnes chances de réussite si le déséquilibre n’est pas trop important, ce qui renforce l’idée d’une stratégie de traitement rapidement progressive. Pour des raisons évidentes de simplicité et d’acceptabilité, cette solution est tentante à la fois pour le médecin et pour le patient. Il faut cependant bien s’assurer de l’absence de contre-indication aux glitazones (insuffisance cardiaque notamment), prévenir le patient du risque d’œdèmes et de prise de poids. Un renforcement des mesures diététiques est souhaitable pour tenter de le limiter. L’intensité de l’efficacité sur l’équilibre glycémique et l’importance de la prise de poids peuvent être très variables d’un patient à l’autre ; dans tous les cas, il faudra donc être très attentif à l’évolution de la situation à 3 mois.   … ou l’insuline ? Chaque année, 5 à 10 % des patients en échec de bithérapie requièrent le passage à l’insuline. En fait, tous traitements confondus, environ 50 % des patients diabétiques de type 2 en France sont au-delà de l’objectif d’HbA1c, ce qui témoigne de la difficulté à adopter une attitude d’escalade thérapeutique. Cela est probablement encore plus vrai en ce qui concerne le passage à l’insuline, du fait des réticences fortes à l’instauration de ce traitement : crainte de la gravité de la maladie, des contraintes relatives aux injections, de la prise de poids, des hypoglycémies… Dans ces conditions, le recours à l’insuline reste souvent trop tardif en France, environ 11 ans après le début de la maladie et dans des conditions de déséquilibre important avec une HbA1c de l’ordre de 10 %2. Il ne faut cependant plus attendre les signes francs d’insulinopénie (hyperglycémie majeure, asthénie, amaigrissement) pour débuter l’insulinothérapie ; il est à ce stade bien plus difficile de trouver une solution thérapeutique efficace, chez des patients dont l’hyperglycémie chronique joue un rôle autoaggravant. - Dès que l’HbA1c dépasse 7 % en bithérapie orale, le recours à l’insuline doit être discuté et mis en balance avec la trithérapie orale. - Si l’HbA1c est supérieure à 9 %, c’est d’emblée l’insulinothérapie qui doit être choisie. - De même, sous trithérapie orale, si l’HbA1c est supérieure à 8 %, il faut passer à l’insuline. Quand l’insuline est débutée au bon moment, c’est un traitement facile à mettre en œuvre, dont la contrainte est réelle mais le plus souvent bien acceptée et dont les effets indésirables sont limités. À ce stade, une coordination de la prise en charge entre médecin généraliste et médecin spécialiste contribue à aplanir les difficultés.   Comment débuter l’insulinothérapie dans le diabète de type 2 ?   Le principe est simple. Il s’agit, tout en maintenant le traitement oral dans la journée, d’y associer une insulinothérapie basale en une seule injection par jour, habituellement le soir, pour couvrir la nuit et ramener la glycémie le matin à jeun proche de la normale (figure 2). Ce schéma est validé depuis le début des années 1990, avec la classique insulinothérapie bed-time  : une injection d’insuline de durée d’action intermédiaire de type NPH au coucher associée aux hypoglycémiants oraux dans la journée. L’arrivée des analogues de l’insuline de durée d’action prolongée – glargine (Lantus®) en 2000 et detemir (Levemir®) en 2006 – a réactualisé ce schéma. Pour qu’il soit efficace, il n’est pas nécessaire que la durée d’action de l’insuline couvre plus que la nuit. Les recommandations préconisent la réalisation de l’injection le soir, mais la durée d’action des analogues longs permet également de l’envisager le matin. Ce schéma est facile à mettre en œuvre, souvent en ambulatoire, après une éducation à la technique d’injection et à l’autosurveillance glycémique si le patient ne la pratique pas encore. Figure 2. Principe de l’insulinothérapie basale (D’après Cusi K et al. Diabetes Care 1995 ; 18 : 843-51). Les doses initiales sont faibles (10 U ou 0,2 U/kg), mais doivent être adaptées très régulièrement en fonction de la glycémie capillaire mesurée tous les matins. Si l’on veut ramener l’HbA1c dans l’objectif, soit en dessous de 7 %, il faut viser une glycémie à jeun normale (les recommandations européennes et américaines proposent une cible de 0,70 à 1,30 g/l). Pour l’obtenir, on augmente la dose pas à pas, par exemple de 2 en 2 unités tous les 3 jours, jusqu’à ce que les glycémies au réveil soient voisines de 1 g/l. Selon les études, la dose moyenne requise est de l’ordre de 50 U/j (0,5 à 0,7 U/j) ; il ne faut donc pas hésiter à augmenter les doses. La pire des situations serait d’imposer au patient la contrainte de l’insulinothérapie, sans se donner les moyens de la rendre efficace en utilisant des doses trop faibles. Dans les études randomisées comparant l’insuline NPH à la glargine et à la detemir, on parvient à obtenir une HbA1c voisine de 7 % au prix d’un ajustement exigeant des doses d’insuline tel que proposé plus haut (figure 3). Les analogues longs ne présentent pas d’avantage particulier en ce qui concerne le niveau d’HbA1c atteint, mais leur utilisation s’accompagne de moins d’hypoglycémies, ce qui est un avantage dans la gestion quotidienne du traitement3. Figure 3. L’insulinothérapie basale du diabète de type 2 à 1 injection bien titrée de glargine (Lantus®) ou de NPH, est efficace pour atteindre une HbA1c voisine de 7 %. Les doses d’insuline nécessaires sont de l’ordre de 0,5 à 0,7 U/kg. Si des hypoglycémies surviennent durant la nuit, il faut diminuer de 2 à 4 unités la dose d’insuline. Si des hypoglycémies surviennent dans la journée, c’est la dose de sulfamides qu’il faudra adapter à la baisse. La mise en route de l’insulinothérapie s’accompagne d’une prise de poids de l’ordre de 1 à 5 kg, d’autant plus importante que le déséquilibre initial est profond. À doses équivalentes, la prise de poids est moindre avec l’insuline detemir. Le début de l’insulinothérapie est l’occasion, au-delà des gestes techniques de l’autosurveillance et de l’injection d’insuline, de reprendre l’éducation de base du patient (hygiène de vie, équilibre alimentaire et activité physique), pour anticiper et réduire la prise de poids.   Et quand l’insulinothérapie basale ne suffit plus…   On peut parler d’échec quand l’HbA1c est supérieure à 7 % malgré une insulinothérapie basale bien titrée, c’est-à-dire permettant d’obtenir une glycémie au réveil voisine de 1 g/l. Cela paraît simple, mais dans la réalité de nombreux patients, considérés en échec, ont une HbA1c supérieure à 7 % mais une titration imparfaite de la basale, dont les raisons peuvent être multiples : objectifs glycémiques lâches, crainte des hypoglycémies, ou réticence à augmenter les doses au-delà d’une certaine valeur (60, 80 unités ?), alors que passer à plusieurs injections peut à ce stade paraître plus raisonnable. On peut également être confronté à l’installation plus complète de l’insulinopénie, nécessitant un apport complémentaire d’insuline pour les repas. Les recommandations indiquent que quand l’HbA1c est supérieure à 8 % malgré une insulinothérapie basale, il faut fractionner l’insulinothérapie, mais n’en précisent pas les modalités. En effet, à ce stade, il n’y a pas de schéma univoque et l’on peut discuter au cas par cas le passage à 2 ou 3 injections d’insulines prémélangées, un  schéma basal-bolus, voire un traitement par pompe à insuline, en considérant que le fractionnement de l’insulinothérapie va volontiers de pair avec une augmentation des doses d’insuline et doit faire considérer le risque de prise de poids supplémentaire.   Début de l’insulino­thérapie dans le diabète de type 2   Une insuline basale est simple et efficace : – titration soutenue pour une glycémie à jeun normale – doses d’insuline nécessaires : 0,5 à 0,7 UI/kg Les analogues longs : – ne font pas mieux que la NPH sur l’HbA1c – mais exposent moins au risque d’hypoglycémies – pourquoi pas le matin ? L’association aux ADO est nécessaire : – Metformine – Sulfamides La prise de poids est moins importante avec detemir en une injection   En conclusion   L’insulinothérapie basale, associée aux hypoglycémiants oraux, est une solution efficace, facile à mettre en œuvre, et acceptable pour les patients diabétiques de type 2 en échec sous traitement oral maximal. Cette stratégie est d’autant plus efficace qu’elle est débutée sans attendre l’installation d’un déséquilibre important, et doit viser une valeur cible d’HbA1c inférieure à 7 %. Elle permet de dédramatiser l’insulinothérapie et d’accepter ensuite plus facilement un schéma plus complexe quand il devient nécessaire.

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