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Éducation-Législation

Publié le 29 fév 2008Lecture 6 min

Les apports protéiques chez les patients diabétiques

H. GIN, hôpital Haut-Levêque, Université BORDEAUX 2

L’équilibre nutritionnel recommandé pour tout le monde se caractérise par un apport calorique qui respecte les besoins et une répartition sous forme de 50 % de glucides, 30 % de lipides et 20 % de protéines. C’est donc ce que tout médecin a appris durant ses études ou lu durant sa formation continue professionnelle et c’est surtout ce qui devrait être proposé au patient diabétique.

Valeur des nutriments   Les glucides représentent les substrats énergétiques par excellence puisque dégradés sous forme d’ATP, sans autres résidus que leur produit d’oxydation, c’est-à-dire le CO2. Les lipides sont relativement ambivalents : ils ont une forte densité énergétique (9 calories par gramme) et sont donc à limiter le plus possible, surtout dès qu’il existe un surpoids ; ils sont cependant susceptibles d’apporter les acides gras essentiels, ceux-ci intervenant comme précurseurs pour la synthèse des prostaglandines et des interleukines, entre autres. Cette notion amène à opposer les acides gras saturés aux polyinsaturés (avec oméga 3 et oméga 6) : – les acides gras saturés sont considérés comme nuisibles sur le plan vasculaire, ils sont en fait surtout inutiles sur le plan de la santé car n’apportant aucun acides gras essentiel ; – les oméga 3 et oméga 6 ont l’avantage d’apporter les chefs de file des différents acides gras essentiels ; c’est à ce titre qu’ils sont obligatoires et qu’ils ont été considérés comme favorables à la protection cardiovasculaire. Les protéines ont pour rôle essentiel la construction de l’organisme et son maintien. Elles apportent 4 calories au gramme mais n’ont pas de finalité énergétique en soi ; leur but est d’apporter les acides aminés utiles à la construction et au maintien de l’organisme, au fonctionnement de ses différentes enzymes, neuromédiateurs et autres. Les protéines sont constituées d’acides aminés, eux-mêmes formés d’une chaîne carbonée se terminant par une fonction amine (NH2). Celle-ci peut subir les réactions de transamination ou être dégradée ; sa dégradation contribue à l’apparition de l’urée ; les acides aminés sont en relation directe avec le filtre rénal. Un apport insuffisant de protéines peut, bien sûr, conduire à la dénutrition protéique, mais un apport excessif de protéines conduit toujours à un état d’hyperfiltration glomérulaire. Le respect des rations glucido-lipido-protidiques doit donc être assuré pour orienter l’organisme vers la bonne santé et un apport protidique excessif doit être évité, surtout à partir du moment où il existe une perturbation de la fonction rénale ; en effet, tout apport protidique excessif est source d’hyperfiltration glomérulaire, laquelle est un facteur d’évolution vers la néphropathie. Les facteurs de l’hyperfiltration glomérulaire sont l’hyperglycémie, l’hypertension artérielle et l’excès d’apport protidique. Il est conseillé un apport protidique pour la population générale aux alentours de 1 g/kg/j mais nos concitoyens et nous-mêmes mangeons en moyenne 1,2 g/kg/j de protéines ; il est recommandé pour les patients néphropathes un apport protidique de 0,8 à 0,9 g/kg/j.   Quelle est la réalité de nos patients diabétiques en France ?   Deux enquêtes permettent de répondre à cette question. La première a été menée chez les patients diabétiques de type 1 à travers toute l’Europe et compare les apports protidiques des patients diabétiques de type 1 dans différents pays européens : le Portugal n’est pas le mieux placé avec des apports de 1,8 g/kg/j ; la Grèce semble réaliser de meilleurs résultats avec des apports de 1,3 g/kg/j de protéines ; la France n’est pas au mieux des performances européennes puisque les patients diabétiques de type 1 français consommaient dans cette étude environ 1,7 g/kg/j de protéines (la recommandation pour eux est de 0,8  à 0,9 g/kg/j). Des résultats identiques ont été obtenus en France chez les patients diabétiques de type 2 ; les patients de la cohorte SU.VI.MAX. qui se déclarent diabétiques ont une consommation protidique plus importante que les patients de la même étude qui ne sont pas diabétiques. Leur apport est de 1,4 g/kg/j de protéines (toujours au-dessus de la recommandation mais aussi au-dessus de ce que consomment les patients non diabétiques).   Apport protéique et patient diabétique apparaît donc comme un sujet complexe Les protéines n’ont pas de relation directe avec la glycémie. Elles sont donc le parent pauvre de l’éducation thérapeutique et souvent finalement laissées comme la part de liberté que le patient est susceptible d’avoir vis-à-vis de la diététique. Par ailleurs, dans l’esprit de chacun, diabète veut dire « excès de sucre dans le sang » et il est souvent considéré que le sucre qui est dans le sang correspond à celui qui était dans l’assiette, conduisant naturellement le patient à réduire ses apports glucidiques, soit de sa propre initiative, soit sous la pression de son environnement familial, de son voisinage, même parfois de son environnement médical ou paramédical. En réduisant son apport glucidique, il compense alors automatiquement avec les autres aliments, c’est-à-dire lipides et protides. C’est avec ce type de démarche que nous assistons à cette augmentation de l’apport protidique qui ne peut en aucun cas être favorable à la santé et peut devenir défavorable en cas de néphropathie débutante ou avérée. Il s’avère donc que l’apport protidique ne peut pas rester indéfiniment le parent pauvre de l’éducation nutritionnelle, mais il importe, à travers une réflexion bien conduite, de se rendre compte que toutes les propositions diététiques  actuellement recommandées pour une bonne santé vont dans le même sens. En effet, théoriquement, il importe de maintenir un apport glucidique suffisant, non restrictif, en faisant toutefois attention aux sucres dits d’absorption rapide. Parallèlement, il faut chercher à réduire la portion lipidique pour lutter contre l’insulinorésistance et surtout contre la surcharge pondérale et le risque cardiovasculaire ; tous les médecins sont d’accord sur le fait que graisses saturées et pathologie vasculaire sont liées et tout le monde connaît la densité calorique des lipides : 9 cal/g). Alors qu’en est-il des protéines ? Il est évident qu’à vouloir réduire les graisses saturées, on lutte contre les graisses animales et qu’en conséquence, il n’est pas possible de réduire les graisses saturées sans réduire l’apport protidique.   L’éducation diététique : une série d’incitations Il apparaît donc qu’une éducation diététique bien conduite n’est pas une série d’interdits mais au contraire une série d’incitations à maintenir un apport glucidique suffisant, satisfaisant et non restrictif, avec un comportement vigilant vis-à-vis des graisses saturées et donc en même temps vis-à-vis des protéines d’origine animale. Ne reste plus alors qu’à régler le problème des protéines d’origine végétale. Il faut opposer dans le monde végétal, légumineuses, céréales et tubercules : – tous les tubercules ne contiennent que des glucides et pas de protéines ; – les céréales contiennent des glucides sous forme d’amidon et très peu de protéines, il n’y a donc aucun conseil particulier à donner pour ces deux types de source glucidique ; – par contre, les légumineuses (lentilles, haricots blancs, etc.) sont riches en protéines (20 g pour 100 g) ; en conséquence, le patient néphropathe doit être informé et faire attention à la consommation de ce type d’aliment.   Au total   Protéines et patients diabétiques est un sujet intéressant mais évoluant aujourd’hui à contresens de ce que devrait être une prise en charge assurant une protection de l’état de santé puisque toute les études montrent que les patients diabétiques mangent trop de protéines, plus que les non-diabétiques qui eux-mêmes dépassent les recommandations de bonne santé. Il importe que tous les acteurs de santé qui prennent en charge les patients diabétiques soient convaincus qu’il ne s’agit pas d’une accumulation d’interdits, mais au contraire d’une incitation médicale continuelle à avoir un apport glucidique suffisant et d’une incitation parallèle à réduire l’apport lipidique en graisses saturées et par voie de conséquence l’apport protidique, le tout ne faisant que respecter les recommandations générales d’équilibre nutritionnel.

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